par Julia Flavia le 21 Novembre 2012, 18:58
J’avoue que je ne suis pas vraiment à l’aise à l’idée de rencontrer Valentina Aquilius. Je suis sure qu’elle doit être une personne charmante et adorable pourtant. Caius est amoureux d’elle, cela se voit à chaque fois qu’il me parle d’elle. Mais je suis terrifiée à l’idée de la rencontrer. J’ai peur qu’elle ne me croit intéressée par son époux ou bien qu’elle se défient de mes intentions à son égard. Caius est un ami et je ne l’ai jamais vu avoir le moindre geste déplacé à mon égard. De mon côté, les choses de l’amour sont tellement étrangères à ma nature que je ne saurais les exprimer.
Caius est presque mon frère. C’est un ami très cher qui m’a parfois sortie de situations délicates dans lesquelles ma trop grande impulsivité m’avait entraînée. J’ai combattu à ses côtés pour la défense de Rome et j’ai appris à écouter ses conseils de prudence. Trop impulsive et bien souvent me croyant invulnérable, j’ai tendance à ne pas bien mesurer les difficultés. Surtout celles des autres… Je crois souvent que les soldats qui m’accompagnent au combat sont capables de me suivre alors qu’ils sont souvent terrifiés et que je devrais les rassurer et les mener au lien de foncer tête baissée au combat.
Caius m’a appris ces choses là. A regarder les autres et à m’intéresser à ce qu’ils ressentent. Pas pour moi, pour eux ! Pour mieux les servir et les guider, pour mieux les défendre et les protéger. En politique ou en société, je suis telle que je suis au combat. Une rude combattante ne craignant aucun affrontement et incapable de céder le moindre pouce de terrain. Là encore, je me suis rendue compte que mon attitude ne servait guère ceux que je souhaite aider. Une fois de plus Caius m’a parlé et j’ai mis un peu de temps à comprendre ce qu’il voulait me dire :
Aux yeux de mes ennemis ou de ceux que je voudrais convaincre, je suis une furie. Je crie, je hurle, je pousse des imprécations et je tente de dominer au lieu de convaincre. J’exagère un peu, mais cela y ressemble. Je ne sais séduire ou convaincre. J’ai souvent l’impression que mes idées sont celles qui ont de la valeur et je ne comprends pas qu’on ne puisse voir les choses telles que je les vois…
En société, c’est pareil. Je suis aimée et révérée par la plupart des Romains. Je protège les plus faibles de la même façon que je protège mes soldats sur le champ de bataille. Mais je ne sais comment donner la meilleure impression à ceux qui ne sont pas de mes admirateurs. Je ne connais ni les usages, ni les us et coutumes du grand monde. J’avoue que je passais plus de temps sur mon cheval à parcourir la cité qu’à m’intéresser aux enseignements que ma mère souhaitait me donner.
Oh je ne suis pas une barbare complète tout de même. Je connais les rudiments des bonnes manières et je ne me vautre pas dans la fange quand même. Pourtant, je ne sais m’habiller ou m’apprêter pour ressembler à une dame. Je suis trop directe, trop impulsive, je le sais… Et Caius me le répète souvent. Je suis désarmée face aux sous entendus et aux moqueries hypocrites… Je manque tout simplement à mon devoir de Championne de Jupiter en laissant à d’autres le soin d’exprimer la parole du temple en mon nom.
Valentina peut t’aider si tu le souhaites… C’est ce que m’a dit Caius. Il m’a raconté combien lui aussi l’aspect social de ses responsabilités lui pesaient… Et combien l’aide, l’attention et l’amour de son épouse lui était précieux en ces moments là. Il m’a proposé de lui demander de m’aider un peu et j’ai accepté. Caius ne me conseille jamais sans avoir bien pensé à ses mots. Il sait combien je peux être butée parfois…
Mais voila… J’ai peur de ce que me dira Valentina. J’ai peur qu’elle ne me juge… Je ne voudrais pas que Caius soit déçu, ni me fâcher avec son épouse… J’ai peur de ce qu’elle ressent ou de ce qu’elle s’imaginera sur nous deux. Après tout, comment pourrait elle imaginer que je n’ai quasiment jamais eu de relation sexuelle à mon age ? Pour une romaine de bonne famille comme la mienne c’est exceptionnel. L’exemple de nos proches nous pousse généralement à expérimenter les plaisirs des sens dès que possible. Pour ma part ce genre d’idée ne m’est venue à l’esprit que très récemment : La prêtresse thalie et son androïde Justina m’ont troublée plus que de raison et je ne sais plus quoi penser… J’ai l’impression de découvrir une nouvelle Julia que je ne connais pas.
Aller… Du courage… Je ne devrais pas rester comme cela devant la porte de la demeure de Valentina Aquilius. Pourquoi est ce que je me sens aussi mal à l’aise ? Je ne ressens pas la moindre peur lorsque je dois aller au combat et une simple invitation à prendre le thé me terroriserait ? Oui… je crois que c’est le cas… Je prends mon courage à deux mains et je sonne à l’entrée pour m’annoncer.
Un serviteur vient m’ouvrir et je le vois écarquiller les yeux en me découvrant. Plus haute que lui d’une tête, habillée d’un grand manteau bleu assorti à mes yeux, je porte aussi des braies et une épée à ma ceinture. Mes cheveux sont attaché et tenue derrière ma nuque pour ne pas me gêner dans mes mouvements. Je tiens dans ma main une lance impressionnante dont je ne me sépare presque plus à présent. C’est la lance sacrée de Jupiter. Sa lame brille au soleil de mille feux. Pour seul ornement, je porte un torque de bronze autour du coup. Celui-ci représente la foudre de Jupiter qui s’abat sur ses ennemis…
« - Julia Flavia Fulgura. J’ai rendez vous avec ta maîtresse… »
Il ne peut me lâcher du regard et je prends conscience que pour une âme paisible et simple, je dois être effrayante. Il y a tant de rumeurs qui courent sur mes combats et mes pouvoirs que je fais souvent ce genre d’effet aux gens que je rencontre.
« - oui… oui… votre… je ... je vais vous conduire à elle… »
Souvent les gens en entendant mon nom, ne se rendent pas compte de qui je suis. Puis lorsqu’ils me voient, plus grande de bien des homme, portant la lance sacrée du Roi des Dieux, soudain ils se rendent compte que je ne suis pas simplement une adepte de Jupiter mais son bras armé, sa représentante dans le monde des mortels. Je suis plus sacrée que le plus haut gradé des prêtres du temple.
Et extrêmement maladroite… Au lieu de la rassurer, mon attitude terrifie le serviteur…. J’essaye pourtant de lui sourire pour le rassurer mais j’ai l’impression qu’il craint de commettre je ne sais quel impair et que de colère je ne le foudroie… C’est contre cette réputation que je dois me battre tous les jours : Ne pouvant me contrôler ou me dicter mes actes, ni me convaincre de les rejoindre dans leurs luttes pour le pouvoir, les prêtres de Jupiter tentent de me faire passer pour une meurtrière folle à lié…
« - Merci, beaucoup… »
Une fois de plus je vois les épaules du serviteur tressaillir… C’est ennuyeux… je ne sais plus quoi faire, j’avoue… Il finit par me guider vers les jardins. Je distingue au loin une jolie jeune femme portant une toge blanche qui lui va à ravir. Je me sens un peu empruntée par rapport à elle avec mon accoutrement guerrier. Je me rapproche tandis que le serviteur décampe sans demander son reste et mes yeux se posent sur le visage délicat de la jeune femme. Doux et harmonieux, il est un enchantement qui me ravit. Je distingue des yeux pétillant, charmant et des lèvres fines et délicates. Je rougie malgré moi en la découvrant… Je m’approche d’elle tentant de ne pas paraître menaçante.
« - Dame Valentina Aquilius ? Je suis Julia Flavia…. »
Je n’ai pas voulu insister sur mon surnom de peur que cela ne fasse trop prétentieux.
« - Je vous remercie de bien vouloir me recevoir… »
Je baisse les yeux pour ne pas montrer combien je suis mal à l’aise aujourd’hui. Ce n’est pas sa faute mais de la mienne. Je ne sais tout bonnement pas comment faire pour qu’elle m’apprécie un peu… Et bêtement, je me tais, ne sachant pas quoi ajouter…