par Cassia le 08 Août 2012, 20:43
Les premiers instants de vie au côté de ma nouvelle propriétaire me semblent agréables et rassurants même. Si j’avais ressentit de l’appréhension lors de sa visite dans le magasin d’esclaves, je reste désormais persuadée qu’elle demeure une romaine attentive, respectueuse de la vie. D’ailleurs, notre conversation me donne dès lors énormément d’indices sur sa conception du monde, ses occupations, sa philosophie, ses croyances. Je suis plus qu’heureuse que celle-ci me confie autant en si peu de temps. Pour cela, je crois que je serais prête à la remercier. Beaucoup y verrait certainement un échange banal, normal oui. Moi j’y vois un désir de me faire confiance, d’établir entre elle et moi, un lien durable, sincère, véritable. Je ne sais pas mentir, ça ne fait pas partie de mon programme de base et je n’ai pas envie de savoir si oui ou non, je pourrais apprendre à détourner la vérité auprès de ma maîtresse. Je souhaite avant tout rester moi-même, être appréciée pour celle que je suis, et je crois que la prêtresse de Vénus pense de la sorte. Je lui souris timidement, alors qu’elle m’annonce que je l’aiderais demain à faire sa toilette. C’est une étrange sensation que je ressens, mais à chaque fois que je suis amenée à servir un humain, à l’aider, je me sens heureuse, fière et utile…
Ma maîtresse est une prêtresse de Vénus et sa virginité est sacrée. Je n’ai jamais saisi l’importance que les humains donnaient aux divinités, mais je respecte profondément les croyances de chacun. J’admire ceux et celles qui vouent leurs vies à une cause si noble. Il faut du courage pour renoncer à une vie facile et aisée, pour œuvre dans un but qu’on ne quitte jamais. Mais une fois encore, je manque d’expérience, de vécu, de comparaison. J’ai des idées toutes faites, des raisonnements qui m’ont été enseigné, implanté lors de ma création. Ais-je réellement une pensée à moi ? Cette question trouvera peut-être une réponse petit à petit, dans un futur plus ou moins proche. Je peux apprendre, j’apprends vite d’ailleurs. J’enregistre tout ce que me confie ma maîtresse avec précaution, comme un trésor sacré, là, dissimulé en mon être qui n’a rien de naturel. C’est mon bien le plus précieux et je veille sur lui. Elle n’a pas de mari non plus. Je crois que cette nouvelle me réjouit. Je le sais parfaitement, je ne devrais pas éprouver ce sentiment face à cette vérité. Pourtant, je suis heureuse de ne pas devoir servir un homme. L’image, la présence de mon ancien maître est encore trop présente en moi. Je redoute la compagnie des hommes. Ils me font peurs. Malgré moi, je cherche à oublier cette joie. Ma maîtresse est belle, elle devrait pouvoir partager sa vie avec l’être aimé de son choix…
Je suis la prêtresse de Vénus dans la maison, notant dans mon esprit scrupuleusement, toutes ces indications, recommandations. L’autel doit être fleurit et je comprends de part sa fonction de prêtresse, que l’autel est naturellement très important pour elle. Ce sera donc une priorité pour moi. Je suis là pour satisfaire ma maîtresse du mieux que je le pourrais. Et si celle-ci est heureuse, alors je le suis également. Suis-je une égoïste ? Je ne puis l’être, je ne suis qu’une androïde, une machine crée par l’homme lui-même, pour ses propres besoins, désirs, envies. Pourtant, je reste convaincue au fond de moi que ma vie ici, sera d’autant plus agréable qu’elle ne se déroulera qu’en compagnie de ma maîtresse. Je ne devrais pas raisonner ainsi, mais cela semble plus fort que moi. J’espère juste que je ne suis pas conçue pour devenir trop étouffante ou présente avec le temps. Ou alors, mon programme m’oblige à me sentir si proche de ma propriétaire, qu’il me serait impossible de faire autrement que d’anticiper tous ses désirs, ses souhaits ? Je crains de lui déplaire, d’aller trop loin, alors que nous ne fiassions qu’à peine connaissance…
La cuisine, l’autel, ma chambre qui est pour moi un autre cadeau. Je n’aurais pas à dormir dans la remise, cachée ou isolée. J’ai ma propre chambre. Je note néanmoins que la prêtresse ne veut pas de ma présence lorsqu’elle ne la souhaite pas. Je comprends cela. Je ne dois pas imposer ma présence. Après tout, je ne suis pas une amie, une domestique ordinaire, encore moins une humaine. Je suis une androïde. La chambre de la romaine est splendide, à son image et je ne peux m’empêcher d’avoir le regard pétillant face au lit immense qui trône en son centre. C’est une femme qui a du goût, du caractère et qui le revendique. Elle est indépendante, sait ce qu’elle veut. Elle m’a enfilé une tunique, sur mon corps encore humide suite au bain, et si le tissu ne laisse pas tout à fait voir ma nudité dessous, il souligne néanmoins parfaitement la courbe de mes seins. Lentement, je m’agenouille face à la banquette sur laquelle ma maîtresse vient de prendre place, et rougis, gênée à sa question qui résonne comme un coup de tonnerre en pleine après-midi. La peur m’envahit soudainement et j’éprouve comme un vertige. Est-ce là un test ? Une épreuve ? Elle a partagé immédiatement avec moi son intimité, ses secrets, m’a dévoilé son lieu de vie, la face cachée que personne ne voit d’ordinaire. Je suis entrée dans sa vie, je ne puis me résoudre à ne pas lui répondre. En suis-je capable de toute façon ? Mon regard s’humidifie, redoutant de pleurer à chaque seconde qui passe et qui semble des heures…
"Mon ancien maître avait l’habitude de venir « me sauter » comme il disait, lorsqu’il rentrait de la taverne. Tantôt c’était moi, tantôt sa femme. Je suis désolée."
Ca, je l’étais plus que de raison. Si les souvenirs étaient déjà affreux, ne m’aidant certainement pas à comprendre la nature humaine, ce sentiment de honte finissait de m’achever psychiquement. Pire que tout, j’avais cru ressentir du plaisir lors de ses instants pourtant non consentis. Je n’ai pas à décider pourtant si je dois m’offrir ou non, je suis une androïde. Cependant, malgré moi, je sais qu’il n’avait pas à faire cela. J’ai bien vu que sa femme n’était aucunement consentante, se débâtant, hurlant et pleurant. Elle aussi éprouvait de la honte. Elle n’en disait rien mais je parvenais comme à le sentir. Je baisse la tête, honteuse moi aussi. J’aurais voulu que ma maîtresse me trouve parfaite, à son goût et que je puisse faire son bonheur. J’ai l’impression que désormais, je viens de commettre ma première faute, celle qui l’éloignera un peu de moi…