Le marché aux esclaves est un des lieux de Rome que je déteste le plus. Parqués là comme des bestiaux, les androïdes attendent le bon vouloir des citoyens romains, engraissant ainsi certains rapaces comme Spurius. Oh je ne nie pas une certaine utilité à l'utilisation des esclaves, mais sans vouloir leur accorder l'égalité, je suis de ceux qui estime devoir les traiter humainement. Le simple fait que certains d'entre eux s'affranchissent de leur plot est une preuve qu'ils peuvent éprouver des sentiments...
Et ce fait me fait douter. J'ai lu des textes datant d'un ancien temps où un esclave pouvait racheter sa liberté et gagner le statut d'affranchi. Cela donnait un espoir à l'esclave et l'espoir, même mince est sans doute le meilleur moyen d'éviter les rebellions.
Mais je suis un soldat et même si ma position de praefectus, commandant de la cavalerie romaine me donne une certaine importance sur l'échiquier du pouvoir, j'évite de me mêler de politique. Le pouvoir corrompt et notre prélat n'en ai hélas que le triste exemple. Mettius n'est plus qu'un tyran à présent et je sais qu'un jour viendra où il perdra tous ses soutiens.
Pourtant aujourd'hui, je suis ici pour compléter ma maisonnée. Valentina et moi sommes mariés depuis peu et si jusqu'à présent je me suis contenté d'avoir peu de monde à mon service, il n'en ai pas de même avec mon épouse. Il est donc grand temps de faire des achats. J'ai bien sur prévenu Valentina des règles qui régissent ceux qui me servent: pas d'abus sur eux, de violences inutiles. Être humain, être Romain, c'est traiter les autres, animaux, androïdes ou humain avec décence.
Il y a peu de monde lorsque je me présente en fin d'après midi au marché. Revenant d'une réunion d'état major, je porte encore casque et cuirasse chamarrée, mon glaive au ceinturon, symboles de mon rang dans la hiérarchie romaine. Je suis très vite accueilli par un homme de petite taille presque nain au sourire édenté et à la tunique qui semble n'avoir jamais connu de nettoyage... L'un des innombrables employés de Spurius qui semble avoir un don pour les choisir laids à souhait... D'aucun disent que cela est une stratégie pour éviter que les clients ne s'attardent pour inspecter la marchandise plus en détail.
Je suis là pour acquérir un androïde pour me servir...
Sans me laisser le temps de finir ma phrase, l'obséquieux nabot se met à me vanter la qualité de sa marchandise. Il ne tarde d'ailleurs pas à m'emmener vers une estrade où se trouvent de superbes jeunes femmes dénudées, me vantant leur savoir pour satisfaire un homme et combler l'absence d'une épouse.... Je ne peux m'empêcher de pousser un soupir avant de reprendre:
Tu n'as pas compris ce que je cherchais...
Une nouvelle fois, le nain ne me laisse pas le temps de finir ma phrase et m'entraine vers une nouvelle estrade. Une nouvelle fois bien sur il se trompe sur le sens de ma demande en me montrant des hommes musclés dont la principale qualité se trouve sous la ceinture. Après tout combien de patriciens romains respectables s'adonnent à de coupables débauches ainsi ? Après tout à Rome, ce n'est pas un crime.
Non je veux un esclave utilitaire et non de loisir.
L'être fait la grimace à ses mots. Les androïdes sexuels rapportent toujours plus à la vente. Néanmoins soucieux de ne pas me déplaire, il m'emmène vers un autre endroit moins mis en valeur, me contant au passage que l'androïde qu'il va me proposer a été pour son ancien maitre une véritable maitresse de maison. C'est déjà mieux et lorsque je me retrouve à une jeune femme blonde d'apparence frêle, aux traits fins portant une simple tunique, j'ai l'air satisfait. Rapidement je me présente à la machine humaine:
Je suis Caius Aquilius Eques, Praefectus de la cavalerie.
Je me présente comme si elle était humaine, portant le poing à mon épaule en guise de salut à son attention. Je poursuis alors:
Comment te nomme t'on ? Quelles sont tes compétences et capacités ?
Je l'examine alors plus en détail sans que cela ne me donne plus d'indications. Les anciens créateurs des androïdes leur ont fait à tous des visages et des corps attrayants ne laissant pas deviner leurs usages réels et rare sont ceux à pouvoir faire la part des choses.
Mais pour le moment je ne peux croire qu'en la parole de la machine au visage angélique qui se trouve actuellement face à moi....