Melina s'en fichait.
C'est un peu raide, comme introduction, mais c'était pourtant la vérité. Voir des androïdes se faire massacrer ne lui posait pas vraiment de problème moral spécifique. Au fond, ce qui était "immoral", c'était de tuer des êtres avec une conscience... Et ayant tous un plot actif, ces androïdes n'en avaient pas vraiment plus que ça, de conscience. C'était triste, mais de toutes manières, la belle 'Lina n'aurait rien pu faire pour les sauver d'une quelconque manière. Sauter dans l'arène en faisant un beau discours serait certes courageux, très... masculin, viril. Mais mourir en héros, c'est mourir quand même, et les morts ne peuvent aider personne.
Elle était donc, ironiquement, devenue aussi humaine que la majorité des humains : penser à sa pomme avant tout, et le reste passe après. Aujourd'hui, donc, elle observerait le massacre sans réagir.
La rousse était arrivée un peu en retard, mais au fond, étant la propriété d'un grand prêtre elle pouvait se permettre ce genre de fantaisie, de toutes façons. En parlant de fantaisies d'ailleurs, c'était la raison de son retard : elle avait remis la main sur plusieurs parures que Sertorius lui faisait mettre, mais elle avait décidé de les modifier en profondeur. Le résultat donnait un mélange surprenant entre une
tenue de détective des années 1920-30 et une robe qu'aurait pu porter une danseuse dans les cabarets de ces mêmes années, alliance surprenante d'atours masculins et féminins (mettant pourtant bien en avant sa féminité autant le dire), mais aussi de couleurs sobres et plus voyantes.
Le chapeau qu'elle portait était assez large, gris clair, sans folie particulière. Le reste en revanche... En descendant l'on pouvait voir qu'elle portait un maquillage bien plus sombre que d'habitude, le visage animé par un petit sourire malicieux. Plus bas encore une cravate d'un rouge vif, par dessus un décolleté plutôt provocateur, et une robe qui était moulante mais avait pourtant des coutures généralement attendues dans des costumes masculins. L'ensemble était toujours de la même couleur que le chapeau, un gris clair sobre, mais les coutures et sous-coutures, la ceinture, les manchettes, étaient de ce rouge-vif de la cravate. Pour le moins étrange donc, mais au fond venant de Melina ce n'était pas si surprenant que ça.
L'androïde arriva quelques secondes après le discours de Caius, surprenant la fin de l'échange entre Tiberius et Camila. Elle ne fit aucun commentaire au sujet de celui-ci, se contentant d'hocher la tête à l'attention de son maître avec un sourire entendu, et d'observer l'intérieur de l'arène, restant debout.
Le spectacle ne serait pas des plus délicats, mais il était malgré tout intéressant. Ici se passerait une lutte de pouvoirs passive, chacun espérant avoir plus d'influence, sans pour autant avoir de contrôle direct sur l'issue de l'évènement. Ils avaient tous fait ce qu'ils pouvaient... Manipulation, politique, tentatives de conviction, parfois de corruption pour les plus douteux, mensonge ou au contraire discours exaltés, tout pour convaincre les Romains de choisir leur Dieu et pas un autre. Une lutte qui paraissait bien décalée aux yeux de Melina... Le monde extérieur étant dévasté, les dieux n'avaient-ils pas mieux à faire, au fond, que de s'occuper de Rome ?