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Précédemment)
Étrangement, je rêvai. Des images, des scénarios étranges mélangeant passé et présent, s'affichaient dans mon esprit épuisé. Comme souvent dans les rêves, ils n'avaient pas énormément de sens. Le cerveau triait les informations, les reformant de façon cohérente, logique, compréhensible. On disait que la nuit porte conseil, voilà pourquoi ce proverbe était tout à fait vrai. C'était pourtant étrange. En 30 minutes de repos, je n'aurais pas dû être en mesure d'atteindre un sommeil suffisamment profond... Cela venait peut-être du fait que j'étais épuisée, et des produits chimiques qui avaient provoqué ce sommeil artificiel et forcé.
Le réveil fut lent. Je fus en fait réveillée par le fait que mes sens étaient revenus : subitement, j'entendais de nouveau, mon sens de l'odorat était revenu, ainsi que ma vue. Comme convenu, après une demi-heure pile, l'ordinateur m'avait rendu le contrôle avant de me réveiller.
Ouvrant les yeux, j'observai les environs... La piscine. En un instant, tout me revint. La rencontre avec Alpharius Omegarès, le repas qui m'avait épargné une longue journée à crever de faim, et nos échanges pour le moins vifs dans l'eau brûlante. Et d'ici un instant, Isaa allait arriver.
J'étais... Partagée. Je pouvais "faire semblant". Sourire, plaisanter, manger, et hahaha hohoho quelle franche rigolade. Je pouvais aussi devenir carrément déprimante, mais dire les choses telles qu'elles étaient. Toute ma vie, j'avais fait le premier choix et voilà où j'en étais... Mais on n'élimine pas si facilement que ça un demi millénaire de mauvaises habitudes sociales. Je me mis à réfléchir à tout cela, pesant attentivement le pour et le contre, tout en retournant dans l'eau qui était encore chaude, et avait encore cette odeur enivrante de fleurs. Je ne savais pas d'où les soldats avaient pu sortir ce genre de choses, mais l'attention était délicieuse. Elle avait de la chance. Lui aussi, note. Quant à moi, hé bien... Je n'appartenais simplement pas à cet univers.
Peut-être devrais-je tenter, alors, de faire ce que j'aurais sûrement dû faire il y avait bien longtemps déjà. J'étais connue pour mon franc-parler, sauf sur un seul point où je ne disais jamais un seul mot. Peut-être était-il temps de corriger cela.
Les risques étaient immenses, et pourtant, je savais consciemment qu'ils étaient ridicules. Mais au fond de moi je ne pouvais m'empêcher de les voir comme quelque chose d'horrible. Ils pouvaient s'en ficher totalement. Ils pouvaient s'en moquer ouvertement. Ils pouvaient me jeter dehors en rigolant bien... Et au fond ils auraient tous les droits de le faire. Je ne voyais pas de raison objective qui les pousserait à faire autre chose, en fait.
A nouveau, face aux risques que j'avais pris par le passé, risques mettant ma vie en jeu de façon directe, ça pouvait sembler ridicule. Mais je préférais encore me retrouver seule face à 5000 Kohriens que dans ma situation actuelle. Bah. De toutes façons, un jour ou l'autre, j'aurais bien été forcée de le faire. Je savais qu'aucun des deux n'accepterait de me reparler un jour, dans tous les cas de figure, mais au moins les choses seraient exposées de la façon la plus claire qu'il soit.
Entendant du bruit dans le couloir, je me redressai légèrement, sortant la tête de l'eau. Vêtue de ce bikini noir et relativement léger qui avait fait tant d'effet au centurion, je braquai mon regard cyan sur l'entrée, commençant à me préparer à ce qu'il se passerait... Le pire, probablement.