Je n'avais pas de routine matinale, ici, et ça m'énervait. Chez moi, c'était toujours très mécanique, mais dans un sens ça aidait à me réveiller dans les meilleures conditions. D'abord mon réveil sonnait, passant un sketch comique totalement absurde que j'aimais bien. Ensuite, je prenais une douche. C'était inutile, car le métal extérieur qui recouvrait les châssis cybernétiques se nettoyait tout seul, mais la sensation de l'eau chaude, même si cette sensation était artificielle, me rafraîchissait l'esprit. Après ça, j'ouvrais la fenêtre pour prendre de l'air frais et je mangeais un morceau en regardant quelque chose, ça dépendait du moment et de mon humeur.
Ici, c'était différent, et presque déprimant. Je pouvais utiliser ma tablette comme réveil, mais malgré la très longue durée de vie de la batterie (plus de 2 ans), je ne voulais pas utiliser cette énergie pour rien. Ensuite, il n'y avait pas de douches ici, ni d'eau chaude à part dans les thermes que je préférais éviter. Ouvrir la fenêtre, je dormais dehors... et manger un morceau, j'aurais bien du mal à trouver le même genre de petit déj' que dans la Citadelle.
Mais ce matin pourtant, j'étais en forme ! Pendant toute la nuit, ma nouvelle androïde avait maintenu la chaleur à fond sur le four en argile que j'étais en train de préparer. Le machin était assez gros, faisant 1m10 de haut, 1m10 de large, et 3m de long. Pour qu'il puisse fonctionner convenablement, il fallait laisser sécher l'argile puis ensuite la maintenir sous un feu très vif pendant une longue durée. Le résultat était convenable, il fallait maintenant que je monte les deux soufflets sur les côtés, que je prépare le dessous (car il y avait des trucs à faire sous le four), et récupérer le métal et le charbon. Ce serait le plus compliqué.
Mais alors que je partis de mon petit refuge, donnant des instructions à Alyxys pour qu'elle prépare les soufflets, j'aperçus un individu sur ma route. Il s'avança légèrement vers moi, signalant qu'il voulait me parler. J'eus un sourire amusé à cette idée de parler "en tête à tête discrètement", répondant alors :
- Ouaw, ça fait très "super secret". On va se rendre dans un établissement crado, et parler en langage codé avant d'ensuite échanger des parchemins discrètement ?
Je savais qui c'était, et je savais que politiquement parlant, s'adresser à lui ainsi était un mauvais plan. Mais c'était tout mon souci... Je connaissais la théorie politique, je savais comment établir un plan à long terme, et préparer un objectif, mais dès qu'il s'agissait de parler à des contacts... Je ne pouvais m'empêcher d'être directe ou ironique. Ce n'était pas nécessairement méchant, il fallait le noter : mon côté moqueur n'était pas nécessairement méprisant. Bon, il l'était souvent depuis mon arrivée à Rome il fallait l'avouer... Mais pas nécessairement, c'était juste mon côté insouciant et joueur qui ressortait.
- Je vous reconnais, vous. Vous êtes le type que Caius s'est mis en tête de faire tomber.
Attrapant la tablette, je la mis en route, un écran d'environ 50cm de large se retrouvant projeté dans le vide. Dessus, des noms de fichiers, affichés en langage de la Citadelle. Je parus satisfaite alors que je retrouvais ce que je cherchais : le log de l'arrivée au Sénat.
La vidéo démarra, de mon point de vue*, rejouant la scène où Caius parlait d'un air fier. Comme toujours, il y avait dans mon champ de vision diverses données ainsi que des indications. A côté de Caius, par exemple, était écrit son nom. A côté des Sénateurs, "Sénateur inconnu". Mon regard se dirigea alors sur l'endroit où était Mettius, indiquant : "Sénateur inconnu" également. La vidéo s'arrêta au moment où la statue lui tombait dessus, Lia se jetant devant.
- Hé ben mon p'tit cœur, c'était pas loin, dites donc. Il paraît que les Romains ont des "pouvoirs" divins, le vôtre doit être d'avoir une chance pas possible.
J'adoptai alors un air pensif, réfléchissant subitement à quelque chose alors que l'image disparaissait et que je rangeais la tablette... Peut-être qu'il pourrait m'être utile.
Vous contrôlez l'armée, si je ne m'abuse ? Vous pouvez faire exécuter des officiers insubordonnés, non ?
Le fou furieux qui m'avait attaquée. S'il était pendu en place publique pour avoir tenté de lever la main sur moi, ça en calmerait quelques uns, et manifestement, vu qu'il était "officier", il devait être de l'armée. De plus, ça me permettrait de m'en débarrasser sans même devoir lever le petit doigt... Cette conversation pourrait devenir intéressante. Sans compter qu'il pouvait peut-être me trouver du minerai, aussi. Très très intéressante. Très très risquée aussi, mais potentiellement riche en opportunités de choix.
Et d'un coup, je pensai à autre chose, demandant alors :
- Oh, et vous devez aussi savoir où se passent les orgies romaines non ? Avec de la bouffe, du sexe, tout ça ?
Il ne fallait pas oublier le principal. Comment ça, c'était cliché, le politicien participant à des orgies ? Mais non c'est pas vrai. De toutes façons, tant que je serais dans cet état, mon cerveau ne marcherait pas convenablement donc ça coûtait rien de demander.
* La vidéo donne une idée générale de ce que voit Katla, et ne représente évidement pas la scène du Sénat ^^