par Camila le 11 Mai 2013, 03:33
La bonne odeur des mets ne m’avait pas mentie sur le plat que je voyais dresser sur la table. Tibérius aurait-il un don pour soudainement et en un peu moins de 15 minutes faire cuire une viande de cette façon là ? Peut-être n’était-ce que le repas que Caeso avait cuisiné… pour qui d’ailleurs ? … sachant qu’ils ne s’appréciaient pas tellement. Bref, ce n’était pas là ma priorité. J’arrivais pieds nus, enveloppée simplement d’un peignoir avec cette impression d’être légère mais à la fois étrange car il me manquait le poids d’une armure que j’avais portée durant des mois. Sans faire de bruit, je m’avançais, le regardant s’afférer à sa tache, très concentré à couper de belles tranches de cette viande qui sentait divinement bon. Je pris un grain de raisin avant de me positionner de l’autre côté de la table et de l’observer s’appliquer avec quelques difficultés.
Le destin bouleverse tant de choses. Tibérius n’aurait pas dû se trouver chez moi. Je le pensais mort. J’aurai dû aller directement au temple de Vénus pour le voir une dernière fois mais toutes les festivités à l’extérieur m’avaient empêchée d’avancer correctement vers mon objectif premier. J’avais dû rebrousser chemin pour parvenir jusqu’à ma demeure…et le trouver Lui. Je pourrai inventer des dizaines d’arguments sur nos retrouvailles, je ne trouverai certainement pas le bon qui a guidé mes pas jusqu’à lui, comme s’il était devenu mon unique et seul repère… Ce qui était vrai. J’étais partie en emportant avec moi son petit mot et notre dernière conversation au Sénat. Il avait été ma force durant toute cette longue épreuve et même lorsque le consul Maximus nous avait conté l’attentat du grand prêtre de Vénus, il était devenu mon espoir, le but auquel me raccrocher pour me sortir vivante de cet enfer et d’aller déposer du jasmin sur sa tombe, ultime aveu que je lui aurai fait. Tout ceci n’avait plus lieu, il était bien vivant. Je souriais à le voir si attentionné avec moi au point de me demander qu’est ce qui avait pu bien le faire changer de cette façon. Peut-être tout simplement que nous n’avions jamais vraiment étaient seuls, en tête à tête, dans un lieu calme et tranquille comme chez moi. Plus besoin de titre, de statut. Nous étions juste Nous.
Je commençais à avoir terriblement faim et d’un autre côté, j’avais tant à lui raconter que j’étais incapable d’ordonner mes idées et d’en faire le tri. Je devais le mettre au courant même si je me doutais que dans les prochains jours, il aurait déjà les commentaires des uns et des autres. C’était assez complexe de lui parler de ces nouveaux Dieux et encore plus quand il s’amusa à me donner un autre raisin, puis un autre, me coupant toute volonté d’expliquer ce qui s’était passé dans le désert. Je lui donnais une tape à l’épaule alors qu’il riait devant ma réaction.
- Avoue que tu veux m’étouffer avec ces grains de raisins. Tu n’avais pas pu le faire le jour des dernières élections.
Je levais mes mains face à lui, m’avouant vaincue sur ce coup là. Remarquez, je n’étais pas en état de lui tenir tête cette nuit. C’était plus un jeu entre nous et il avait raison. Nous avions le temps. Les bras croisées, la moue mutine, mes prunelles le dévisagèrent avec amusement.
- Avoue aussi que de me donner des ordres pour me faire taire te manquer terriblement.
Je me laissais guider à la table, m’installant sur la chaise qu’il avait avancée pour moi. Le repas fut dès plus silencieux. Non pas que nous étions gênés, l’un ou l’autre, mais j’appréciais cet instant de tranquillité qu’il m’offrait et ce bon diner. J’en avais besoin. Ses remarques me firent sourire de nouveau.
- Quelle délicatesse et quelle prévoyance de m’éviter de gouter à ta cuisine.
La viande était excellente comme je m’en doutais, tout comme le vin et le pain. Enfin de la bonne nourriture et non pas ces repas des soldats qu’ils faisaient avec ce qu’ils avaient et ce qu’ils trouvaient. Je n’avais pas relevé ces derniers mots sur le fait de nous allonger après tout ça. Je lui avais fait comprendre mon désir de ne pas le voir partir d’aussitôt, et Tibérius avait saisi toute la portée de mes paroles.
Une fois terminé, je trouvais un repos bien mérité dans mon lit, sous le drap et les couvertures. Par bienveillance et par respect, Tibérius s’était allongé par-dessus. Mais s’il pensait que j’allais laisser quelques couches de tissus nous séparer, ce ne fut pas le cas. Alors comme ça, j’avais maintenant le droit de parler ! Je le pinçais au niveau de sa hanche avant de venir me blottir dans le creux de son bras, ma joue posée contre son torse, fermant mes yeux. J’aurai pu rester là, silencieuse, appréciant et goutant sa présence et son contact. J’inspirai lentement, cherchant par quoi commencer.
- Je vais bien. Epuisée mais ça pas besoin de le souligner, tu l’as déjà remarquée Mais vois-tu, je suis heureuse. Très heureuse parce que tu es là, avec moi. Je n’aurai pu recevoir de cadeau plus merveilleux que de te revoir ce soir.
Je me serrai contre lui, plus fort, mon bras encerclant son corps, ouvrant finalement mes paupières et me redressant légèrement pour admirer son visage. Mes doigts caressèrent doucement sa joue, dessinant le contour de sa mâchoire jusqu’à ses lèvres.
- Et toi…Comment vas-tu ? Ce que tu m’as racontée avant le diner… c’est… effrayant. Mais comment t’étais-tu rendu-compte qu’on en voulait à ta vie, que tu étais visé par un attentat ? il y a bien quelque chose qui t’as mis la puce à l’oreille, tu n’auras pas mis un mille visages à ta place comme cela, du jour au lendemain …
Sapiens… ainsi Tibérius le connaissait au point d’avoir confiance en cet homme.
- Sapiens a été mon mentor durant très longtemps. C’est un peu comme un second père pour moi. Je ne savais pas que vous étiez proches tous les deux. Avant de partir, il m’a donnée ceci.
Je levais ma main lui faisant découvrir un tatouage étrange qui encerclait mon poignet et remonter délicatement sur le haut de ma main.
- C’est un talisman. Il m’a aidée à protéger les soldats… surtout lors de la dernière attaque.
J’attendrai ses explications et j’étais toute ouïe avant de lui parler de ce mal être qui ne m’avait pas quittée durant tout le voyage du retour. Et seul Tibérius pourrait à la fois m’écouter et me conseiller sur ce que j’avais vécu lors de l’apparition de Minerve et de Pluton dans le désert.
Merci à Lia pour le Kit ♥