Oh que j'étais en train de faire une grosse boulette. Ce n'était pas bien, pas bien du tout. Mais je n'avais pas le choix. C'était une question de vie ou de mort. Pas la mienne, je m'en foutais bien, non, mais j'avais peur pour Alexia. Je ne voulais pas qu'elle finisse dans les bas-fonds, elle y avait déjà passé trop de temps. Il fallait que je la sorte de là. Coute que coute. Quitte à donner ma vie artificielle pour la sauver. Elle m'avait protégé, c'était à moi de le faire maintenant et même si elle ne s'en souvenait pas, je ferais tout pour elle. Alors, le plus doucement du monde, je levais le loquet de la porte et poussait la planche de bois qui ne grinça qu'à peine. Mes yeux firent la netteté dans ce noir complet. Où était-elle?
Un mois plus tôt
- Qui ça? Alexia? Aah, la bonniche, celle qui puait comme la mort? Nan. Elle est p'u là.
- Je voulais une nuit avec elle. Vous savez où elle est, désormais? A-t-elle été vendue à un autre lupanar?
- Je sais t'y, moi? T'êt'e b'in...
- Est-ce que les propriétaires des lieux gardent des traces des androïdes revendus?
- Mais qu'est-ce que j'en sais, moi. Un jour, la maîtresse l'a sorti des cuisines, l'a trainé jusqu'à un char et elle est partie.
- Reconnaitriez-vous l'homme qui conduisait le char?
- Nan. C'était un commis... D'un grand homme, c'qui parait.
Aucun grand homme ne venait acheter une androïde dans un lupanar, encore moins celles qui nettoyait. Peut-être pour son plaisir, mais pas les bonniches. Alexia... Où es-tu?
- Désolée, m'sieur, j'vais devoir y aller, à moins que vous ne voulez d'une nouvelle, je peux être votre jouet maintenant.
- Non merci. Au revoir.
Je repartais. Zut. Je m'étais fait passé pour un client, la capuche de ma cape bien enfoncée, afin qu'elle ne voit pas la marque sur mon front. Ma pauvre Alexia. Où donc es-tu?
2 semaines plus tôt
- Regardez ses belles paires de fesses. Elles encaissent tout, aussi bien le fouet qu'une caresse. Posez-la quelque part et elle ne bougera plus de là. Ahaha. Presque neuve, pas beaucoup utilisée, mais possédant des programmes à faire palir les meilleurs des put...
Je n'écoutais déjà plus. Spurius vendait ses androïdes comme il lui plaisait. J'avais des choses moi aussi à faire. Je devais ramener des fruits et des légumes pour ma propre maitresse. Maée m'avait donné la liste des courses à faire. Sans parler qu'il fallait que j'aille chez le menuisier pour récupérer un meuble abimée par les deux jumelles dans une de leurs chamaillerie ou je ne savais quoi, ce n'était pas mes oignons de toutes manières. Je continuais donc ma route, mais un choc électrique intérompit mon geste et je lachais mon panier. Tiens, ça ne m'était jamais arrivé avant. Je me baissais et le ramassais et mon regard finit par tomber sur l'estrade. Spurius apportait déjà une autre esclave. Jolie, la peau parfaite, le r... Merde! Je lachais mon panier quand je m'aperçus que l'esclave n'était autre qu'Alexia. Mon sang ne fit qu'un tour, mais je me retenais. Je ne devais pas bouger. Pas bouger. Pas bouger. Je scrutais le moindre visage dans l'assistance, afin de reconnaitre, celui ou celle qui pourrait l'acheter. Mais personne ne fit une offre. Alexia retourna dans l'arrière-boutique et l'espace d'un court instant, je fus soulagé, quoi que... Spurius n'était pas connu pour être doux et délicat avec sa marchandise. Bon sang, il fallait que je la sorte de là. Le plus difficilement du monde, je quittais le marché et m'aquitais de mes taches. Mais le coeur n'y était pas, tout mon esprit était tourné vers le comment sortir ma soeur de là.
5 minutes plus tôt
Je regardais Spurius quitter sa boutique. Nous n'étions jamais passé par sa boutique, mais j'avais réussi à cuisiner un esclave qui était passé par là. Emmitouflé dans mes vêtements noirs, j'étais vraiment une ombre dans une ombre. J'avais même mis de la suie sur mon visage pour que personne ne me reconnaisse. Je ne voulais pas incriminer ma maitresse. Elle me foutait la paix, alors je lui en étais redevable. Je levais les yeux au ciel. Non, il n'y avait personne là-haut. S'il y avait un dieu, alors il n'était pas de mon côté. Mais si jamais il se mettait en travers de mon chemin, alors je mourrais pour ma soeur et je m'en foutais bien si c'était dans la douleur. Alors voilà, je laissais quelques minutes défiler dans mon cerveau et je m'approchais de la porte discrète de l'arrière-boutique.
Je la vis. Elle était là, enchainée à un mur. Ma lèvre trembla, mais je ne dis rien. Elle s'était désactivée, probablement pour recharger ses batteries. J'espérais qu'aucun autre androïde ne s'était mis en alerte. Près de la porte, sur un clou, une grosse clé pendait. Surement pour décadenassé les chaines, je la pris lentement et m'approchais de ma soeur. D'un même mouvement, j'enserrais son poing gauche et je posais mon autre main sur sa bouche. Et afin qu'aucun androïde ne puisse entendre ce que j'allais dire, je m'approchais de son oreille.
- Alexia. Ecoute-moi. Ne fais aucun bruit... C'est... un ordre.
Je me reculais, juste assez pour pouvoir lire dans ses yeux. Bon sang, ils avaient perdu toute l'intensité d'avant. Mais je me promettais qu'elle recouvrera la mémoire et qu'elle retrouvera cet éclat qui faisait de ma soeur, la plus belle du monde.