par Titus Acilius le 23 Décembre 2012, 18:10
Titus ne supportait pas qu'on lui dise ce qu'il devait faire. Si c'était un officier, plus gradé que lui, il obéissait, évidemment. Mais si c'était quelqu'un d'inférieur au sein même de l'armée, là, c'était inadmissible, mais un civil. Non, il ne pouvait pas. C'était presque viscéral. Et tant pis si la personne en question était Sénateur, Pape ou Dieu... Il n'avait d'ordre à recevoir de personne, seul Pluton, le Prélat et les officiers plus gradés pouvaient se le permettre. Il se tut néanmoins et retourna à son camps. Les paroles de Caius encore dans son crane...
Nous ne pouvons pas faire demi-tour, centurion.... Pas sans avoir quelque chose à rapporter de ce voyage. Le peuple de Rome compte sur nous et si nous revenons vaincus... Peu à peu Rome sombrera. Vous et moi, dans un pareil cas ne le verrions pas car le prélat n'attend que notre échec pour décapiter l'armée de ses officiers compétents , nous accusant de trahison et nous condamnant à mort.
Ne pas pouvoir faire demi-tour? Il était toujours possible de faire demi-tour. Même en route pour le Sanctuaire de Pluton, il était encore possible de faire demi-tour. Quant à rapporter quelque chose, il avait déjà. Il y avait eu des morts, ils avaient des corps à rapporter aux familles qui attendaient. Mieux vallait revenir sans objet de conquête, mais en vie, plutôt que de faire lambiner ceux qui patientaient et craignaient pour leurs vies. Rome sombrera? Seul l'avenir et les Dieux pouvaient prédire cela. Pas les simples mortels. Le Prélat? Pourrait-il vraiment faire cela? Titus n'était qu'un centurion, il ne s'immisçait pas dans la politique et ne pouvait donc pas dire si le Prélat pouvait ou non les faire décapiter parce qu'ils étaient rentrés "bredouille".
Les hommes de Pluton lui firent oublier les paroles viles échangées avec l'homme de haute stature, le civil. Il oublia également les dires de son supérieur. Non, il fallait continuer. Jusqu'où iraient-ils? Impossible de savoir. Mais un civil surgit de nulle part c'était déjà quelque chose. Devant un petit laraire en l'honneur de Pluton, le Centurion se laissa tomber à genou.
- Que dois-je faire maintenant? Les fils de Minerve ne possèdent aucune humilité. Les autres sont aveugles ou ont été aveuglés par la toute puissance de la Déesse Guerrière. Ô Pluton, que j'ai besoin de ton aide. Comment leur faire comprendre?
A cet instant même, un guetteur se rua sur Titus, pointant l'horizon, bien au sud, en direction de la sacro-sainte ville de Rome. Des scarabées? Des dizaines. Bon sang... Il n'avait pas besoin de cela maintenant. Un ordre arriva également de la tente du Préfet. Alerte maximale? Les Plutoniens l'étaient déjà, à partir du moment où ils avaient quitté les murailles de Rome, ils avaient été en alerte générale. Déjà les Gardes attrapaient leurs lances, leurs boucliers, les quelques archers se positionnèrent derrière la rangée de métal et reculèrent lentement, tous ensemble, comme une seule armée, resserrant leurs rangs, fortifiant leurs défenses. Quelques soldats de bas rang et les dernières recrues plièrent les quelques tentes, rangèrent le matériel sur les chars et se mirent à la bride des animaux de bas. Ils n'iraient pas loin sans eau dans le désert. Le fait de garder ces animaux étaient plus que vital. Non seulement pour le moral des troupes, mais également pour leur survie.
- En retrait. Vers les rochers là-bas.
Le message avait été murmuré. Les Plutoniens n'avaient aucune envie que les sales bêtes les entendent. Les scarabées n'étaient peut-être que des scarabées, mais elles étaient des créatures de Pluton, et donc dotées d'intelligence. En quelques longues minutes, alors que les premiers soldats de Minerve se lançaient aveuglément contre les créatures, les Gardes avaient posé le pied sur une formation rocheuse. Les bestioles ne pourraient pas apparaitre dans le sable maintenant. Et puis, au sein même de la pierre, ils ressentirent un grondement terrifiant. Bon sang. Titus chercha du regard l'imposante bestiole qui allait bientôt apparaitre. Les vers des sables étaient des créatures plus affamées que ne l'était Cerbère. Leurs machoires imposaient et terrifiaient le plus hardis des Gardes de Pluton. Un bruissement de métal se fit entendre puis une plainte stridente du fer qui plie, qui se déforme et qui s'enfonce dans le sable. Les Minerviens n'étaient pas si loin. Le sol était devenu prairie pour étoile filante. Des dizaines de flèches enflammées illuminaient le ciel. Titus n'en revenait pas. Il y avait des points positifs au feu, mais ils y en avaient également d'autres bien négatifs. Il se rendit compte que les Gardes et les Soldats n'avaient pas du tout la même façon de se battre. Si les Plutoniens frappaient pour tuer, les Minerviens tiraient et voyaient qui étaient morts après. Ils gaspillaient énergie, munition, terrain et même certains périssaient n'ayant pas été assez vigilants. Il n'eut pas le temps de continuer d'observer la scène que les scarabées, énervés par ces volées de flèches se lancèrent sur les Plutoniens.
Ils n'étaient pas beaucoup, mais ils étaient parfaitement organisé. Un tireur et de chaque côté, deux hommes, boucliers et lances prêtes faisaient le lien. Si un tireur tuait un scarabée d'un pilum en pleine bouche, tout le cercle se déformait et ils allaient, ainsi récupérer la lance, toujours défendant le tireur, ne le laissant jamais seul. Ils avaient appris, avec l'expérience, les meilleurs endroits pour éradiquer les scarabées : dans la bouche, à l'abdomen ou sous les jonctions des cuirasses. Vu que les scarabées attaquaient, ils visaient la bouche, grande ouverte, mandibules de sortie. En quelques minutes, le cercle de protection des Plutoniens tenait toujours, mais les hommes commençaient eux aussi à s'épuiser. Ils avaient marché toute la journée sous le soleil ardent, n'avaient eu que peu d'eau et portaient des armures lourdes. Leur moral au plus bas n'aidait aucunement. Au centre du cercle, les ânes et les boeufs piaffaient, mugissaient et s'apeuraient face aux cris des bestioles. Un autre ver des sables surgit quelques dizaines de mètres plus loin. Il ne tarda pas à leur foncer dessus. Il fallait un changement de tactique. Un sifflement suffit et cinq hommes qui étaient restés au centre, afin de remplacer un homme mort ou éreinté entourèrent Titus. C'était à eux d'entrer en piste.
Tous les six traversèrent leurs propres lignes et courrurent vers l'énorme bestiole dévorante. A ce moment, ils n'avaient pas peur des scarabées, car ces derniers connaissaient la puissance d'un ver et les craignaient, ils ne risquaient donc rien. Les hommes se séparèrent et entourèrent la tête du ver, afin de ne pas risquer une mort en groupe. Pendant qu'un Garde de Pluton attirait l'attention du ver, les autres visait les yeux et les nerfs de la bestiole sous la peau, la perforant de toutes leurs forces. En quelques minutes et après beaucoup de sueur, le ver gisait, deux soldats seulement furent blessés, envoyés valdingués par la puissance du corps du ver. Titus s'était foulé le poignet et maintenant pestait. Une blessure bête, faite en essayant de relever l'un des deux soldats. En moins d'une minute, ils étaient de nouveau au centre du cercle et les deux soldats reprenaient leurs esprits. Les relèves dans le cercle se firent de plus en plus nombreuses. Il fallait vraiment changer la donne, mais tant que les Minerviens feraient n'importe quoi, ils ne pourraient pas aller bien loin. Titus, épuisé par l'attaque du ver, chercha du regard le Préfet, mais ne vit que du sable soulevé par le galop des chevaux un peu plus loin.
- Centurion, le civil est là!
Titus tourna le regard. Maximus n'était vraiment pas loin, encore en train d'attaquer une colonie de scarabée avec une petite unité. Dos à dos ou tout seul, ils allaient tous mourir. Titus grommela encore une fois avant d'avancer vers eux, gardant les pieds toujours sur les rochers. Il leur lança.
- Ne restez pas dans le sable! Ils seront encore plus nombreux si vous les énervez comme ça!
Il alla jusqu'à chopper deux soldats de Minerve par le col et les envoyer vers le cercle défensif des Plutoniens. Puis il tendit le bras à Maximus, sans un mot, paume vers le ciel, le regard sévère et sans émotion.