par Thalie Helvius le 26 Septembre 2012, 22:38
La soirée se veut calme et paisible. J’ai invité mon amie, amante, consœur Lucretia à venir passer ce temps en ma compagnie. Non pas pour nous adonner à une prière, ou bien encore à des ébats fougueux et passionnés comme nous pouvons en connaître parfois, mais bien pour discuter sérieusement. Depuis quelques temps, une lourde atmosphère semble planer sur la ville et le temple. Le danger semble présent plus que jamais et je crains sincèrement pour la vie du Grand Prêtre. Oh bien sur, je n’aime pas que celui-ci s’en amuse. Il est d’une nature à n’en faire qu’à sa tête, se moquant des réactions qu’il peut provoquer chez ses interlocuteurs. Il fait fit de la raison parfois, ou adopte une stratégie, attitude comprise que par lui seul. Et même-moi qui, pourtant, le connais plus que bien, j’avoue avoir bien souvent du mal à le comprendre, à la suivre. Mais c’est aussi après tout ce qui le rend si unique, et fort heureusement. Un Tiberius, c’est assez pour Rome. Deux, c’est comme jeter les 7 plaies d’Egypte sur cette ville mais en pire encore. Heureusement pour moi, je connais assez de monde dans cette cité pour pouvoir tenter d’intervenir dans le cours des évènements, si la déesse Vénus me l’autorise, naturellement. C’est ainsi que j’ai parlé de mon angoisse à propos de Tiberius, et qu’ainsi, j’ai apprit la fonction première de son androïde, Roenna avec qui j’ai eut le plaisir de partager un moment en compagnie de Lucretia justement. La suite fut simple et logique : Roenna devrait apprendre au Grand Prêtre à se battre, se défendre…
-- Pardon ! Pardon ! Pardon ! Je ne sais pas ce qui m’a prit, je ne comprends pas ! Pardonnez-moi prêtresse Thalie, pardonnez-moi prêtresse Lucrétia.
Je sursaute soudain en voyant cette esclave entrer dans mes appartements, un couteau à la main. Paniquée, je reste comme figée, jusqu’à ce que l’androïde se jete au pied de mon lit. Elle semble totalement perdue, apeurée et pire encore, complètement instable. Voilà pourquoi je déteste les androïdes. Avec eux, on ne peut jamais savoir à quoi s’attendre. Un jour ils vous adulent, le lendemain ils vous tuent dans votre sommeil ! Quoi ? C’est pareil avec les humains ? Oui mais les humains, c’est ainsi depuis la nuit des temps. Quand j’y repense, il fallait être complètement idiots pour créer des androïdes à notre image, leur accordant exactement les même défauts que nous…
"Lucretia ! Elle a un couteau !!"
-- Je, je, je ne comprends pas. J’ai pris cette lame …
-- Il dormait paisiblement et … oh pardon... pardon... pardon... Je ne sais pas pourquoi j’ai fait cela...
Là, j’avoue, je ne cesse de paniquer. D’une, parce que j’ai une machine folle furieuse au pied de mon lit, de deux, parce que je comprends que trop bien la raison de tout ce sang, les mots de cette androïde tueuse…
"Thalie, file chez Tiberius voir dans quel état il se trouve… s’il est encore en vie. Tu es meilleure infirmière que moi. Je m’occupe d’elle. Sois très prudente, elle n’est sans doute pas la seule présente au Temple."
Aussitôt, je saute du lit, prenant grand soin de rester aussi loin que possible de cette androïde, courant à toute allure, aussi vite que mon corps en est capable vers les appartements de Tiberius. Le souffle court, le cœur battant plus que de raison, j’arrive bientôt devant la porte restée entrouverte. Prise d’un vertige, je n’ose franchir le pas de sa porte. Je connais bien ses appartements, pour m’y être souvent rendue. Mon cœur semble se figer dans ma poitrine et je suis parcourue d’un frisson glacial. Ma main tremble, tandis que je pousse la porte qui grince lentement, dans un bruit trop glauque à mon goût. Déjà, des larmes coulent sur mes joues et lorsque j’entre enfin, trouve la chambre, je vois Tiberius allongé dans son lit, inerte, les draps et sa tenue maculés de sang…
"Oh non par Vénus… Tiberius !"
L’instinct prend souvent le dessus sur la raison en des moments extrêmes. J’ai beau ressentir l’envie de fuir devant cette vision cauchemardesque, je ne peux m’empêcher de vouloir sauver celui qui occupe une si grande place dans ma vie. Le lien qui nous unit est unique et inqualifiable. Nous sommes plus que des amis, des amants, des membres du clergé de la déesse Vénus. Nous sommes au-dessus, au-delà de tout ceci. Il me semble le connaître depuis toujours et bien encore et ce sentiment est réciproque, partagé. Je m’approche de son corps et lorsque je le touche, je sens cette froideur terrible…
"Vénus s’il te plaît… aide moi "
Je pleure maintenant à chaudes larmes et ma vision est complètement brouillée. D’un revers de main machinale, je tente de les essuyer, les chasser. Pour tenter quelque chose, il me faut voir ce que je fais. Je n’ose à peine toucher son corps, tailladé à de multiples endroits de coups de couteau. C’est une vision horrible que je dois contempler de force. Mes doigts glissent à son cou, cherche une veine afin de tenter de percevoir un pouls. Je pose l’oreille sur sa poitrine, essayant d’entendre un faible battement de cœur, mais rien. Paniquée, apeurée, je me refuse néanmoins d’admettre l’évidence. La peur se transforme en colère, en énergie du désespoir, alors que je détaille les blessures plus sérieusement. Il me faut voir si des organes vitaux sont touchés mais au vue des nombreuses traces, il est clair que ce doit être le cas…
"Tiberius !! T’as pas le droit !"
Je m’énerve comme-ci en cet instant, il pouvait m’entendre, ouvrir les yeux et sourire en me disant que c’est une farce. Là je crois que je le tuerais de mes propres mains, mais au moins, je serais soulagée de savoir que tout ceci n’était en rien la réalité. Je soulève son vêtement et je reconnais une marque de naissance du Grand Prêtre. Je le connais suffisamment assez intiment pour la reconnaître au premier coup d’œil, et cette constatation ne fait qu’un peu plus se serrer mon cœur dans ma poitrine. Je commence à vouloir me résigner, à accepter ma mort mais une énergie du désespoir s’empare de moi et je commence à panser une plaie, puis deux, voulant arrêter le saignement qui naturellement, continue de plus belle. Et alors que je me penche pour détailler la plaie la plus importante, je remarque quelque chose de totalement incohérent…
"Impossible !"
Je reste muette quelques longues secondes, totalement interdite. J’ai sous mes yeux non pas un humain, mais un androïde. Totalement perdue, déstabilisée, je me demande réellement si ce n’est pas un mauvais rêve. J’ai envie de crier au secours, d’appeler de l’aide, mais le fait de savoir que j’ai sous les yeux un androïde, m’empêche d’agir. Si Tiberius était réellement un androïde, je crois que je m’en serais rendue compte, d’une façon ou d’une autre ? Je ne sais quoi faire, quoi dire et encore moins quoi penser. Cette soirée est décidément bien trop horrible pour moi…