par Caecilius le 22 Septembre 2012, 14:31
Mes doigts me brulaient en réalité, je désirais vraiment la toucher, découvrir son visage, pouvoir voir sa beauté que je pouvais aisément deviner grande. Elle avait beaucoup de coeur, elle était une femme de caractère, une femme intelligente, elle attirait les regards des hommes pour son physique, elle attirait le mien pour tout ce qu’elle était. Son amitié pour moi, l’amitié que j’avais pour elle, notre amitié, rien ne semblait pouvoir venir la ternir, elle m’était une amie précieuse, une amie chère à mes yeux, je l’appréciais énormément. Le temps avait voulu que finalement mes sentiments à son égard évoluent, qu’ils deviennent plus personnels, qu’ils deviennent plus poignants, pourquoi avait-il fallu que de toutes les femmes de Rome, mon coeur se laisse emballer par la plus inaccessible de toutes pour un homme comme moi ? Je savais bien le manège de Tibérius, elle m’en avait parlée, comme elle ne m’avait pas gâchée son propre trouble à l’égard du Grand-Prêtre à qui elle devait apparemment sa nouvelle nomination en tant que Sénatrice. Il était bien plus convenable qu’une Sénatrice soit avec un homme de sa trempe, un homme impliqué dans les affaires de la Cité, un homme que la ville connait, avec assez d’influences pour la protéger ou, à défaut d’y parvenir, la venger. Pour moi plus que pour quiconque sans doute, il était clair et évident que cette femme était très loin d’être faite pour moi. Rien que son amitié était proche d’être miraculeuse, j’avais eu de la chance, mais apparemment une part de moi souhaitait abuser de cette chance que j’avais eu. En abuser au point d’espérer qu’elle puisse ressentir ce qu’elle me faisait ressentir. Je n’étais pas dupe, ce n’était et ne serait sans doute jamais le cas, je me devais donc de l’accepter et tant bien que mal je le faisais. Ce soir plus encore qu’un autre, avec la confession qu’elle me ferait bientôt, mes sentiments seront encore beaucoup plus difficiles à supporter. Je la sens changée, différente, dans sa voix quelque chose n’est pas enjoué comme à son habitude, comme si elle se forçait et se contraignait, pourquoi ce soudain intérêt à me sentir la toucher et la découvrir de mes doigts ? Je l’ignorais, je ne comprenais pas. Pas encore.
Alors le plus naturellement du monde, je tâche de profiter, d’être l’ami qu’elle venait voir, ce n’est définitivement pas un jeu difficile car sa présence est agréable et visiblement je sais encore la faire rire et l’amuser. C’est visiblement la meilleure chose que je sache faire, être un bon ami pour elle, un rôle dans lequel je semblais condamner à rester car finalement qui pourrait espérer mieux pour moi à son égard ? Elle apprécie mon humour et y répond avec un humour qui me fait sourire, ma vie devient plus pimentée à ses côtés ? Si seulement elle pouvait savoir combien c’était vrai. Je ris, amusé :
- Oh tu sais, je crois que même si tu n’étais pas Sénatrice, tu as tout le caractère et les savoirs nécessaires pour pimenter la vie des personnes autour de toi !
J’y croyais sincèrement pour le vivre moi-même, mais pourtant elle allait porter un coup violent à la bonne ambiance qui était en train de se mettre en place entre nous dans cette soirée. Elle partait avec la mission en partance pour les terres désolées hors de la Cité. Suicide collectif, le seul nom qui me venait pour parler de cette folie, j’avais vu ce qu’il y avait dehors, ça m’avait pris mon frère et apparemment ça allait aussi prendre la femme que j’aime. « Ca », un mot sans appel pour désigner les bêtes horribles que l’Homme a un jour crée et qui continue de vivre sur ces terres, en maître absolu qui plus est, au sommet de la chaine alimentaire, bien loin au-delà de l’Homme qui fait aujourd’hui pâle figure à côté de ses créations d’antan. Elle m’explique ce qu’elle a tenté de faire, une lutte vaine contre l’expédition, son obligation d’y aller, j’ai envie de réplique que la seule chose à laquelle on est obligés dans cette vie, c’est de mourir. Tout le reste on peut choisir de le faire ou pas, mais de mourir, ça tout le monde est obligé. Riche, pauvre, adorateur de Venus, de Jupiter, de Pluton ou de Minerve, d’un Dieu mineur ou même athée. Tout le monde meurt un jour, ainsi vont les choses, ainsi va la vie, mais de sortir se battre, c’est courir droit vers la mort pour l’embrasser, un suicide.
- Je te remercie de ton honnêteté. J’aurais fini par te pardonner, on pardonne tout avec le temps il paraît. Je préfère l’apprendre de ta bouche et comprendre la raison de ta présence de cette façon que dans quelques jours quand vous serez partis par les mots d’un autre qui en rirait.
Je lui fais un petit chantage, mais je crois qu’après ce qu’elle vient de me dire, c’est un moindre mal. Elle va partir à la mort, finalement peut-être est-il temps qu’elle sache ce que je lui cache, qu’elle sache pourquoi j’ai refusé de la toucher et la découvrir pendant tout ce temps de notre amitié. Elle s’installe autrement, juste face à moi, assez proche pour que je sente la chaleur de son souffle se dissiper dans l’air. Avec douceur je cherche son visage, sentant sa tête qu’elle a penché pour m’aider à trouver sa joue. Doucement, je caresse sa peau, aussi douce que je l’avais imaginée :
- Si pendant tout ce temps j’ai refusé de te voir comme je peux le faire, c’est pour une raison Camila. Tu es entrée dans ma vie d’une façon peu commune, sans te présenter, sans jouer de ton rôle de Sénatrice et je crois même que si je ne l’avais pas découvert ce soir-là, tu aurais tout fais pour que ce ne soit jamais le cas. J’admire ce trait de ton caractère, modeste et humble malgré tes responsabilités et tes fonctions. J’aime savoir que tu trouves le temps de venir voir un homme comme moi, qui n’a rien à apporter en politique ou dans le domaine de la guerre. Tu es une femme aux multiples facettes et je les apprécie toutes, la guerrière qui sait être implacable et protège son prochain, la Sénatrice qui se bat contre la mort inutile de centaines de personnes, la femme qui me surprend d’un diner avec moi, l’amie qui se montre honnête. J’ai laissé mon coeur aller à des sentiments qui ne doivent pas être envers toi, parce que justement j’aime tout ce que tu es et qui fait qui tu es, je suis tombé amoureux de cette femme qui voulait cacher son rôle de Sénatrice et qui m’avait protégé un jour. Ne pas te toucher est comme une façon de me protéger, de ne pas céder à ces sentiments que je devrai pas avoir pour toi.
Doucement je me penche vers elle et du bout des lèvres l’embrasse d’un léger baiser avant de me reculer à nouveau, ma main abandonnant son visage pour revenir contre mon corps :
- Je ne suis pas l’homme qui doit être à tes côtés et je le sais parfaitement. Mais je crois que tu devais savoir cela avant de partir, en fait non c’est purement égoïste, je voulais que tu le saches pour ne pas, quand on me dira que tu ne reviendras jamais, que je regrette de ne rien avoir dis. L’égoïsme est un cruel défaut et je m’en excuse, mais je ne voulais pas te voir disparaître sans avoir dis ce qui pèse à mon coeur. Et maintenant … Je crois que nous avons un diner savoureux à partager.
Un sourire vient orné mon visage, un petit clin d’oeil encourageant, passée la confession, maintenant comme je l’avais promis, un ami heureux de la présence de la jeune femme.