Combien rare avait-il été dans ma vie que de me retrouver ainsi proche d’une jeune femme ? Je ne saurais le dire, mais je n’avais pas l’habitude de ce genre de contacts si doux et chaleureux, je savais que c’était là le rôle auquel je m’étais engagé au moment même où j’avais choisis de venir en aide à cette inconnue mais pourtant cela restait étrange. Sa présence si chaude et triste contre moi me touchait énormément, j’aimais la sentir ainsi blottie contre moi, une part de moi apprécie véritablement cela tout en ne pouvant ignorer le triste côté de savoir que c’est motivée par la peine que cette jeune femme si charmante est contre moi. Je préfèrerai que ça soit par gaieté, amitié ou amour, mais c’était là par réconfort, quelque chose que je consentais sans hésitation aucune à faire car sa peine, celle de perdre la personne qui nous est la plus chère, je ne la connaissais que trop douloureusement. Et pourtant je me rendais compte que même dans sa peine et sa tristesse, je parvenais quelque peu à l’apaiser. Cela me faisait plaisir de voir que je parvenais à dédramatiser un peu l’horreur cruel de cette situation qu’elle vivait. J’entendais à nouveau dans sa voix un sourire, je la sentais plus détendue, plus à l’aise, cela me rassurait de savoir qu’elle ne pleurait plus, qu’elle s’apaisait un peu, cela montrait que finalement je n’étais pas si nul dans les relations humaines que j’avais voulu le croire. En tous les cas, ses mots me font sourires autant que plaisir, l’entendre parler des fleurs comprendre et réaliser que nous partageons pour les fleurs le même amour, cela est surprenant, je n’avais jamais imaginé tomber un jour sur quelqu’un qui me donnerait le sentiment d’être comme moi. Pourtant nous nous ressemblions tant dans notre amour des fleurs, j’en restais stupéfait et particulièrement heureux. Heureux d’avoir choisis de lui venir en aide, heureux de la rencontrer, de me rendre compte que je ne suis pas le seul fou à parler aux plantes en espérant une réponse et parfois en entendant même l’une d’elles répondre :
- Pourquoi devrait-on avoir honte d’aimer les fleurs comme on le fait ? D’être différents à cause de ça. Moi j’aime bien être différent, aimer les fleurs d’une façon que peu de personnes comprend, et je veux bien être différent avec toi.
Une façon de plus de la rassurer, lui faire comprendre que je ne mentais pas, j’étais là ce soir pour elle, pour la rassurer et la consoler, lui donner la chaleur humaine dont elle semblait avoir besoin, et je serai encore là demain, le jour d’après et tous ceux qui suivront jusqu’à ce finalement les dernières fleurs qui seront proches de moi orneront ma tombe. Clio était la jeune fille aux fleurs mais j’imagine que ça devait avoir une signification précise pour les autres, différente de celle que nous avions elle et moi, pour moi c’était positif qu’elle soit ainsi surnommée, sa belle différence, cet amour un peu fou et incompris des plantes. Elle me touche énormément quand elle dit qu’elle se serait sentie moins seule si j’étais entrée plus tôt dans sa vie, c’est une confession bien étrange qu’elle me fait là, évidemment je ne peux qu’apprécier de sentir qu’elle me valorise de la sorte mais pourtant je reste surpris de sa solitude. Elle est si douce et gentille, comment pouvait-elle avoir souffert de la solitude alors qu’elle me semblait être un tel ange ? Peut-être que de me retrouver en elle sur certains points me faisait prendre parti en sa faveur, mais pourtant Clio est quelqu’un de formidable, je peux le sentir dans sa voix, ses mots, simplement dans le contact de son corps contre le mien, rien que le fait qu’elle aime les fleurs la rend unique et importante. Jamais eu d’amis. Comment est-ce possible alors qu’elle est si charmante ?
- Oui mais désormais tu n’es plus toute seule Clio. Et n’importe quand lorsque tu te sentiras seule, tu pourras venir me trouver, tu pourras venir me voir, me parler, je serai là tout le temps. Et je te demande pardon de ne pas être entrée dans ta vie avant, que tu aies été si seule, mais cela appartient au passé, désormais je suis là et tant que tu voudras de moi, je resterai.
Sa nouvelle question en revanche me laisse sans voix, est-ce que je veux être son ami ? Voilà qui semble une façon horriblement brutale de présenter les choses mais même si je voulais qu’il en soit autrement, n’étions-nous pas déjà amis en cet instant ? Et puis comment ne pas dire « oui », comment ne pas considérer que c’est déjà le cas tandis que la serre contre moi avec tendresse pour lui faire oublier sa tristesse et son chagrin ? C’est donc avec le sourire que je lui réponds d’une voix chaleureuse et amicale :
- Aussi longtemps que tu voudras que je sois ton ami.
Avec douceur je me surprends à déposer un baiser sur son front, signe tendre de mon affection pour elle, je la connais depuis peu de temps, mais tout en elle me plait, comment ne pourrait-on pas aimer ce petit ange des fleurs ? Posant doucement ma tête contre la sienne, je ferme les yeux quelques instants, c’était si rare que je me retrouve ainsi avec une femme, pourtant c’était si agréable :
- J’aime beaucoup ton odeur, tu sens les fleurs, plein de fleurs, c’est un mélange vraiment très agréable à sentir, je trouve que c’est un parfum qui te va vraiment très bien.
Puis finalement, n’oubliant pas sa détresse et sa peine, je prends le risque de demander même si je me doute que sa réponse sera sans doute toute relative :
- Ca va un peu mieux ?