[E3] Les peuples les plus civilisés ...

[Caius Aquilius]

Le conseil du Consul m'arrache un sourire. J'avais, jusqu'à très récemment cru que Maximus n'était pas homme à faire part de la moindre once de sentiment, son poste le rendant à la fois respecté et craint des romains. Aussi bien loin de me vexer, son conseil, par ailleurs fort aimable, touche mon être.

Je crois que vous avez raison.... Un jour de plus ou de moins ne changera pas grand chose dans cette folle aventure et je dois bien cela à mon épouse.

Je me tourne vers Valentina, la regardant comme au premier jour. Elle est celle qui m'insuffle ma force, celle qui m'oblige à chaque instant à ne montrer que le meilleur de moi, faisant taire les doutes que je pourrais avoir au fond de moi.

Et je crois que cette dernière partage cette analyse.... Mais si je peux vous rassurer tous deux, je compte bien faire en sorte que cette folie se transforme en triomphe pour Rome. Il faut y croire car.... Vous avez parler d'espoir consul Maximus et vous avez raison.

Je m'interromps l'espace d'un instant. Je réfléchis parfois à bien des choses, conséquence indirecte de mon don pour les choses de l'esprit.

En fait.... Je vais également vous demander une chose, Consul. Celle de croire en notre réussite et de prier les dieux pour cela. Dans notre cité, croire est une force que trop de monde sous-estime. Pourtant plus j'y réfléchis, plus je me dis que c'est cela la véritable puissance de Rome, la croyance.

Les dieux sont partout dans notre vie. Notre dévotion à leur égard les rend forts et ils donnent leurs bienfaits à Rome en échange. La croyance, la force des prières font office de bulletin de votes pour élire le sénat de la cité. Les dieux nous protègent car notre croyance en eux est sans faille...

Et l'on peut penser ce que l'on veut mais sans eux notre ville ne serait à présent qu'un champ de ruines.

Alors je vous en prie croyez en nous et faites de sorte que le reste de la ville aussi.

Maximus a de l'influence même si il s'en défend. Il me faut des gens ainsi à Rome pour éviter que Mettius n'insinue par de basses manœuvres politiques la croyance de l'échec d'une telle opération.

Et faites attention à vous. L'avenir va être sombre pour ceux qui ne font pas preuve d'une dévotion sans faille à certains dirigeants, même si cela ne fait que traduire une volonté de neutralité. L'expédition est un pretexte idéal pour purger toute opposition....

La majorité de l'armée partie de Rome, nulle force ne s'opposera aux sbires de Mettius. Sans rien savoir, je me doute que ce serpent a une idée derrière la tête et que nombreux sont les gens de valeur à craindre pour leurs vies de façon justifiée...

D'ici qu'il s'octroie encore plus de pouvoirs...

A présent si vous voulez bien m'excuser...

J'ai nombre de choses à préparer... La date se rapproche et si je veux profiter de ma femme quelques jours, j'ai intérêt à avoir tout clôturer avant....

Mon devoir m'appelle. Mais sachez que cette Domus vous sera toujours ouverte.

Je me redresse avec un signe pour Valentina. Je ne doute pas que mon épouse partage à cet égard mon point de vue sur la question.

Bonne journée Consul.

Il est temps pour moi de partir.... Je laisse soin à Valentina de s’occuper de reconduire notre invité à la porte en bonne maîtresse de maison...

Et peut être à t'elle des choses à lui dire....

Quand à moi, alors que mes pas m'éloignent d'eux, mes pensées voguent ailleurs, vers un projet auquel je songe depuis que le prélat a décidé de s'attaquer à moi en me nommant contre mon gré chef d'une expédition insensée dont il se figure tirer les ficelles....

[Valentina Aquilius]

Valentina ne connaissait pas le consul mais fut surprise qu'il leur donna un tel conseil. De prime abord, ce n'est pas l'homme duquel on attendrait un conseil matrimonial ou tout simplement sentimental. La Romaine baissa la tête avant de jeter un coup d'œil à son époux. D'elle-même, elle ne le lui aurait jamais demandé. Elle savait combien sa fonction était importante d'autant plus en étant préfet de Rome. Face à un tel poids, que pouvait-elle espérer ? Elle ne doutait nullement de l'amour de son époux pour elle. Mais savait qu'il ferait passer les préparatifs de la mission avant sa famille. Elle faisait avec même si effectivement, elle aurait préféré passer plus de temps auprès de lui. Mais n'était-ce pas les sacrifices qu'elle devait faire pour être l'épouse d'un soldat ? Elle ne lui demanderait jamais de choisir entre elle et sa fonction. Cette dernière était trop importante pour lui. Il avait du beaucoup lutter pour atteindre ce but. De quel droit ferait-elle jouer son amour contre cela ? Elle ne s'en sentait pas le droit même si quelque part au fond d'elle, elle sentait que si un choix devait être fait par son époux, il n'était pas certain que ce soit l'armée qui le remporte.

La jeune femme ne s'attendait pas à ce que Caïus accepte aussi facilement le conseil et la proposition de Maximus. Mais elle en était ravie et un sourire magnifique orna son faciès de poupée. Ainsi il acceptait de renoncer quelques heures à ses impératifs militaires pour rester près d'elle.

« Je ne tiens pas à vous faire rater vos préparatifs mon époux mais je ne peux que me réjouir de vous garder auprès de moi quelques heures avant ce départ. - elle tourna son visage vers le consul – Voilà un conseil qui valait la peine d'être donné ! Je n'aurai jamais osé demander une telle chose par moi-même. Je sais trop combien la fonction de mon mari est à la fois prenante et importante pour lui. Je ne tenais pas à me mettre en travers même si j'avoue que profiter un peu plus de lui me ferait grand plaisir. »

Une journée de gagnée, ce n'était pas rien. Une journée avant ce grand départ qu'elle redoutait tant. Les paroles du consul sur les créatures du désert ne la rassurèrent pas même si elle n'en montra rien. Mais en fait, aucune parole n'aurait pu la rassurer. Même si elle n'était jamais allée dans le désert, elle connaissait ses dangers comme bon nombre de Romains. Mais peut-être ne serais-ce pas le désert le plus grand danger au fond mais les ennemis qui pourraient se trouver au sein même des rangs du corps. Rien ne tranquilliserait vraiment la jeune femme si ce n'est le refus de son époux à participé à cette mascarade. Mais il n'y renoncerait pas et elle ne le lui demanderait pas. Elle ne pouvait donc que cacher ses doutes et ses craintes et prier pour son retour. Elle conservait un visage de femme heureuse et épanouie, fière de son époux et de ce qu'il allait accomplir.

Caïus parlait d'espoir pour les Romains. Elle aussi devait garder l'espoir en son cœur. Quand le corps expéditionnaire aurait quitté la cité, il ne lui resterait plus que cela. Le maigre espoir de voir son époux revenir de cette folie guerrière. L'espoir faisait vivre mais Valentina espérait que ce ne serait pas un espoir chimérique. L'avenir s'annonçait bien sombre aussi bien pour ceux qui partaient que pour ceux qui restaient d'ailleurs. Bon nombre d'entreprises risquaient de voir le jour durant l'absence des soldats et le prélat risquait de profiter de l'éloignement des troupes pour asseoir encore plus son autorité sur la cité. C'est elle alors en tant que sénatrice qui devrait essayer de le contrer. L'avenir s'annonçait vraiment sombre pour tous.

Caïus ne s'attarda pas dans la discussion, déjà sa fonction le rattrapait ainsi que les préparatifs pour le départ. Valentina lui sourit comme à l'accoutumé.

« Je vous retrouverais donc ce soir mon époux. - elle se tourna vers le consul – Ce domus vous sera effectivement toujours ouvert consul. Vous y serez toujours le bienvenu. »

Valentina prit les devant raccompagnant Maximus vers la porte alors que son époux était déjà parti. Alors qu'elle ouvrait la porte à son invité, elle ne put s'empêcher de lui parler.

« Je... Je voulais vous remercier... pour ce que vous avez dit... votre conseil... Je n'aurai jamais osé demander cela à mon époux. Je ne pense pas qu'il aurait refusé mais je sais combien sa fonction est importante pour lui. Je ne tenais pas à jouer les épouses jalouses ou éplorées même si je préférai qu'il passe du temps avec moi plutôt qu'avec ses soldats. Mais c'est là le lot d'une femme de militaire, je suppose. - elle sourit un peu tristement – Merci cependant, au moins je pourrais profiter de lui un peu plus avant... son départ. »

La jeune femme espérait ardemment que derrière ce départ, il y aurait bien un retour et qu'elle retrouverait l'homme qu'elle aimait d'ici quelques semaines. Qu'il soit ou non auréolés de gloire, elle s'en moquait éperdument dès l'instant où il revenait. Elle saisit la main du consul, la serrant doucement en signe de remerciement encore une fois.

« N'hésitez pas à revenir quand vous le souhaitez, cette maison vous est grande ouverte consul. »

Sur le pas de la porte, elle salua l'homme une nouvelle fois avant de le regarder s'éloigner.