par Sibylla Atilius le 09 Septembre 2012, 03:13
Mon sourire s'agrandit quand il parla de plante. Il était vrai, et connu dans presque tout Rome, que le Consul Proteus vivait de peu et se suffisait ainsi, ne cherchant aucune forme ostentatoire de pouvoir ou de richesse. Sa forge était son trésor et cela lui suffisait amplement. Oui, nous étions bien différents. Je me demandais bien ce qui m'avait poussé à lui parler, la toute première fois. Cela faisait bien des années que j'avais ma place et Maximus arrivait à peine, il était déjà connu pour être un homme discret par son travail et sa prestance, pourtant, physiquement, on ne pouvait pas dire qu'il était discret, bien au contraire. Peut-être était-ce cela qui m'avait fait aller vers lui. Peut-être aussi, qu'il réagissait comme un androïde quand on lui redemandait de réinitialiser un être synthétique. Nous n'étions pas si éloignés que cela, pas si différents. Une plante dans une forge? Je me pris à sourire avec coeur, car il était vrai que la plante, si elle n'était pas coriace, ne survivrait pas par 40° à l'ombre, dans un endroit aussi petit. Non, même moi qui n'était pas jardinier pour deux sous, savait qu'il fallait de l'espace, un peu de vent, de l'eau, du soleil et un peu d'ombre. Ce viridarium était l'endroit idéal pour une croissance idyllique. Le ton redescendit brusquement lorsqu'il parla du Corps Expéditionnaire. Je hochais la tête pensivement.
- Minerve est au sommet de sa Gloire cette année. Si nous n'envoyons pas nos troupes, nous ne le ferons jamais. Peut-être est-il encore trop tôt, mais j'ai foi. Les androïdes ne vont pas tous partir et ils sont assez nombreux dans la ville pour subvenir à nos besoins. Il n'y aurait pas de marchand si nous en manquions.
Que je détestais mentir à Maximus. Ma voix était retombée et j'avais préféré contempler plantes et fleurs de mon jardin plutôt que de défier le regard du géant à mes côtés. Je me fichais bien d'envoyer mes androïdes à l'abattoir ou de les garder inutiles chez moi, mais tous Sénateur qui se respecte, et surtout celui ou celle qui tenait à se faire bien voir, se devait de participer à l'effort de guerre. Je me fichais également du tôt de natalité humaine, car je n'aurai aucun enfant de toute évidence. Que cela était un homme ou un être synthétique qui périsse sur le champ de bataille, cela ne prouvait qu'une seule chose, c'était qu'il devait mourir ou s'éteindre ici. Maximus évita alors le sujet sobrement, me promettant de s'occuper de mes androïdes quand il me plairait. Je hochais silencieusement la tête pour clore le débat, mais je n'y manquerais pas dès que l'occasion se présenterait. Et puis, soudainement, après une inspiration, comme s'il se jettait à l'eau, Maximus m'étonna, même me coupa le souffle. Même si je savais que ce dernier n'était que pure invention afin de me faire passer pour humaine, il me coupa littéralement le souffle et je pris quelques secondes pour m'en apercevoir avant de relancer le programme. Je ne savais comment répondre à cela et ne pus, pour le moment que lui offrit un sourire incrédule et gêné. Il s'excusa de ses mots et je baissais les yeux, attirée par la qualité du sol. J'avais toujours été une femme forte, hautaine, volontaire. Je découvrais après 400 ans, la timidité. Je n'aimais pas ça. J'avais l'impression d'être faible, d'être... dépendante. J'ouvris la bouche pour poser une question, mais je préférais la refermer et le laisser continuer, car mes programmes embrouillés ne savaient pas quoi lui répondre de toute manière. Maximus continua sur sa lancée, proposant que j'aille acheter un androïde qui me ferait oublier ma solitude. Etais-je vraiment seule? Je préférais être seule, car il y avait moins de risque que je fasse une erreur ou que l'on remarque le code barre à mon poignet. Mais il n'y avait aussi personne à qui me confier. Non, cela de toute manière, je ne le pouvais pas, cela serait compromettre ma survie mémorielle. Mais oui, peut-être irais-je quérir les services d'un nouvel androïde, plus perfectionné que les simples taches qu'on leur insignait. Maximus précisa également qu'il avait acheté une esclave. Une masseuse. Une masseuse pouvant ressentir l'énervement, la colère? Il n'y avait pas vraiment de doute, l'androïde devait avoir d'autres qualités et ce genre de qualité-là... Je ne savais pas que Maximus les appréciait. Après tout, je savais le Consul sans épouse ni enfant, sans aucune aventure connue. Cela ne lui ressemblait pas de prendre ce genre d'androïde. Cela en devenait presque... repoussant. Le terme n'était peut-être pas très approprié, mais j'avais toujours préféré Maximus sans aucune compagne, plutôt que de le savoir en train de batifoler. Oui, mon imagination me portait loin, j'avoue. Mais prenez un homme, une androïde et 80m² de forge... Il y a bien mieux à faire que de frapper l'enclume... Non, cela ne me plaisait pas vraiment, allez savoir pourquoi et mon visage dût trahir quelque peu ce sentiment. Je passais outre, d'un geste inutile de la main avant de redresser le regard, reprendre mon allure de sénatrice, même si auprès de moi, j'avais un ami. Il commenta la statue en question.
- Mon époux l'avait déjà quand nous nous sommes épousés. Je l'ai fait mettre ici, car elle se confondait bien dans le jardin. Maintenant que tu dis qu'elle représente Pluton... Ah non, je vais la laisser là.
Il n'avait pas idée du nombre de surprise que j'avais encore et qu'il ne pourrait jamais deviner. Cela aussi, les mots maladroits de Maximus me frappèrent une nouvelle fois, je me sentais lasse d'un coup et je ne savais quoi y faire. Il fallait que je me reprenne. Je lançais donc subitement.
- J'aimerais qu'elle soit baignée d'une douce lumière, des dizaines de bougies. Je voyais bien une canopée ou une armature en métal pour contraster avec le blanc de la pierre et des bougies qui serait suspendues, comme si elles flottaient. Tu vois ce que je veux dire?