par Caecilius le 10 Septembre 2012, 08:24
Oui je me détendais quelque peu, les drogues que je fumais depuis un petit moment maintenant ne devaient pas être étrangères à ce comportement en réalité. Cela me donnait une certaine distance par rapport à la réalité, vous savez un peu comme le crédo "rien n'est vrai, tout est permis", et bien je me détendais. Le comportement de l'androïde n'y était pas étranger non plus, elle semblait vraiment s'inquiéter de son Maître, elle semblait être véritablement honnête lorsqu'elle me parle, donc en conséquence, l'un dans l'autre, je me retrouvais un peu plus à l'aise. J'avais toujours l'appréhension de me demander si son plot était actif ou non, soyons réaliste au milieu de la forêt, seuls tous les deux, si son plot était inactif et qu'elle décidait de me tuer, je ne pourrai pas faire grand chose pour me défendre. En dépit du fait de pouvoir voir à travers ses yeux, je ne ferai pas le poids face à elle, suffisait encore qu'elle ait eu une formation de combat et je serai complètement dépassé. Mon domaine n'était pas celui du combat, je pouvais sans aucun problème m'en prendre à quiconque avec ma connaissance des plantes, mais je n'étais pas de ces fourbes et je n'étais pas non plus de ceux qui se battaient, je tâchais de vivre avec ma cécité, comme je pouvais dans cette société pas toujours honnête. La remarque de l'androïde me fait lever un sourcil :
- Tout autant que la présence d'un androïde à mes côtés puisse ne pas toujours m'être parfaitement agréable, je crois que si une androïde se souciait de moi comme vous pour lui, même si mes maux étaient parfaitement soulagés et le seraient en son absence, je ne la ramènerai pas au marché.
Comme dirait l'autre dans cette phrase que je déteste "mais bon moi je dis ça, je rien hein ?!". Seulement j'étais honnête, si une androïde me donnait comme elle l'attention qu'elle a pour son Maître, il n'était pas exclu que les maux passés, ceux causés par un androïde peureux, soient au moins en partie effacé. J'avais la rancune tenace car finalement mon frère était mort, ce n'était pas rien, mais même ces maux là pourraient être effacés avec assez de temps, de patience et de bonne volonté. Seulement pour que je fasse le premier pas, il faudra me donner l'envie de le faire. Je souris à la remarque de la jeune femme, il était évident que sans l'accord de son Maître, il était de toute façon exclu de la découvrir, j'avais pourtant l'impression que nous ne nous étions pas entendus totalement sur ce que j'entendais par "voir une personne". Il y avait des choses que je pourrai peut-être me permettre avec un peu d'habilité, mais je ne le faisais pas, il y avait du respect à avoir :
- Ne vous y trompez pas, quand je dis voir, je ne parle que du visage. Je ne profiterai jamais de ma cécité pour pouvoir "voir" une personne dans la totalité de son corps. Chez les voyants aussi ce privilège est réservé à l'intimité, alors je n'y prétends pas.
Oui c'était une limite, la décence, les voyants ne se voyaient entièrement nus que dans l'intimité, parfois par jeux ou dans les bains, alors pourquoi sous prétexte de ma cécité aurai-je droit de voir plus qu'un visage ? Même si on m'offrait de le faire, je doutais d'en profiter, si je n'avais jamais vu ma cécité comme une tare ou un frein à quoi que ce soit, je n'entendais pas en abuser non plus. Et puis j'avais pour habitude de vivre plutôt seul ou en tout cas dans une forme d'inconnu bien particulière et définie. Je vivais parfois en discutant avec des gens pendant des années sans avoir la moindre idée de leur visage, ils étaient alors simplement une odeur, un rire, une sensation ou une émotion qu'ils m'ont fait ressentir. Tout comme je n'ai pas besoin de voir les fleurs pour les connaitre, les reconnaitre, les trouver et les aimer, je n'ai pas besoin de voir un humain pour pouvoir apprécier un moment avec lui. Et apparemment il en était de même avec cette androïde même si je commençais doucement à ne plus toucher réellement le sol. Tout était distant et lointain, de plus en plus, pour preuve, je tirais encore des bouffées de ma pipe alors même qu'il n'y avait depuis un bon moment absolument plus rien à en tirer :
- Certaines fleurs adoreraient la chaleur d'une forge, d'autres pour peu que vous accompagniez cette chaleur d'une bonne humidité pourrait devenir vraiment magnifique mais il est vrai qu'en majorité, la chaleur cuisante d'une forge les tuerait. En tous les cas, si votre Maître y consent, je vous accueillerai dans ma boutique l'après-midi du premier jour des semaines où il serait disposé à vous laissez venir.
La date n'était pas choisie au hasard, c'était un moment où ma boutique était toujours fermée, pour cause c'était bien l'après-midi que je passais le plus régulièrement en compagnie de mes plantes. Je pouvais rester parmi elles pendant des heures, je leurs parlais, je les entretenais, je m'assurais de leur bonne croissance. Alors ça serait sans doute le meilleur moment pour accueillir l'androïde et lui montrer les diverses plantes et leurs effets. Je ne prétendais pas les connaitre toutes, loin de là et puis certaines fleurs ne faisaient jamais qu'être belles où posséder des odeurs envoutantes. Et certaines pouvaient se montrer dangereuses, empoisonnantes parfois même mortelles, il fallait se méfier, on ne pouvait jouer impunément avec toutes les fleurs, on ne pouvait par exemple pas faire n'importe quoi avec le berbéris que touchait la jeune femme. Ses épines sont dures, bien plus que celles des roses, elles font particulièrement mal, personne n'a envie de perdre sa main ou pire sa jambe dans une de ces plantes. Même les animaux au pelage épais évitent de s'y frotter, pour cause ces plantes peuvent être véritablement douloureuses et leurs épines sont impitoyables :
- Je ne dois mon adresse qu'à ma nécessité de l'avoir. Plus que les voyants, je me dois de me méfier et faire attention. Il m'a fallu apprendre des méthodes pour éviter que mes maladresses ne soient catastrophiques ou de me faire mal bêtement.
M'accroupissant je prends entre mes mains une ortie, la caressant de mes doigts avant de les présenter parfaitement indemne à la jeune femme :
- Tout est question d'apprentissage et parfois aussi de chance. En tombant avant, j'aurais pu ne pas essayer de me rattraper avec toute la confusion que ça aurait pu provoquer, pire j'aurais pu poser mes mains sur votre poitrine, mais non, mes mains ont trouvé le sol. Si vous aviez été plus large d'épaule qui sait ce qui serait arrivé ? Ma cécité n'ampute pas mes réflexes, je crois même qu'ils sont plus affutés que ceux des voyants. Auriez-vous préféré que je tombe simplement sur vous sans même tenter d'éviter que ça n'arrive ?
Avec un sourire et d'une voix joueuse :
- Que voulez-vous, ça n'a rien d'étonnant, c'est bien là mon charme naturel et incomparable. Nul n'y résiste !