par Sibylla Atilius le 27 Août 2012, 13:29
J'avais établi un code particulier, au fil des années quant à mon appellation. Les inconnus ou les gens du bas peuple finissait par me nommer Dame Atilius. Les sénateurs et personnages de haut-rang avait compris que Sénatrice Atilius était le seul patronyme que j'acceptais. Il n'y avait que de bien rares personnes qui m'appelaient Sibylla et Maximus en faisait partie. Je devais avouer que j'avais quelques réticences avec mon prénom. Il m'avait été donné par mon créateur, cet homme que je haïssais et que j'adulais à la fois. Mes époux, dans l'intimité de ma demeure avaient fini par prononcer Ceres. Ce surnom, je leur avais soufflé dans un murmure. A la mort de mon créateur, j'avais été appelée Dame Ceres et j'avais énormément apprécié ce surnom. Je le réutilisais encore quelques fois, mais pour de bien rares occasions. Il fallait que cela soit un ami des plus intimes, des plus proches. Maximus, je ne savais pas encore, s'il fallait que je lui accorde ce passe-droit, il restait un être étrangement dangereux pour ma condition, mais en même temps, je me sentais en sécurité quand nous étions présents dans la même pièce. Je ne savais vraiment pas sur quel pied danser avec lui, mais pour rien au monde je ne désirais le voir s'éloigner. Il prit ma main dans la sienne et l'enferma avec sa jumelle. Mon poing semblait si minuscule, mais je serrais tout de même la sienne avec chaleur, cette chaleur qui n'appartient qu'aux femmes. Les politesses faites et oubliées, il me rappela à quel point les séances au Tribunal étaient d'un barbant atroce. Au compliment, je ne pus que sourire généreusement. Oh oui, qu'on parle de moi, cela m'offrira une renommée encore plus grande parmi les Consuls et surtout les Sénateurs. J'aimais avancer dans l'ombre, faire semblant de rien et terminer sous le regard de tout le monde. Cela avait toujours été ma façon de faire. Rester discrète, mais grimper les échelons avec facilité, pour cela, il n'y avait pas de secret, simplement une recette facile d'utilisation : de la patience, des bons contacts et une dose d'hypocrisie. Mélangez le tout et vous obtiendrez une androïde rompu aux dialogues du Tribunal et du Sénat. J'avais été réélue et gagnais même un rang, plus près de la fosse, plus près du Prélat, plus près du pouvoir. Maximus me rappela à la réalité quand il s'embarqua sur le sujet présent dans toutes les bouches depuis la fin du Jour des Jeux.
- Ils ont avec eux, la puissance de Minerve. Jupiter était le dieu de Rome, mais Minerve peut peut-être parvenir à conquérir les étendues sauvages. Ne t'en fais pas, tant que tes mains ne se lasseront pas de leur art, il y aura toujours du travail pour toi et un sourire sur ton visage. Minerve est vaillante. Ils reviendront.
Oh, je doutais fortement de mes propres propos, pourtant prononcé avec assurance. Mais je demeurais une sénatrice de Minerve et je devais passer pour telle. Il répéta une question qui au sein des Consuls était présente depuis des années. Oui, pourquoi ce Corps expéditionnaire réussirait-il. Je n'avais pas besoin de répéter mes paroles, seul un sourire assuré se planta sur mes lèvres. Visiblement, il n'était pas pressé, car il m'offrit un siège, sur un banc tout proche. Nous avions parfaitement oublié la présence de l'androïde qu'il avait apporté. Et je ne m'en souciais pas non plus. Ce fut son tour de me demander comment je me portais. Prenant un peu de sérieux et laissant mon regard dériver dans le vague, ma voix se fit plus douce, presque triste, oui... triste...
- Et bien... Mon époux a été assassiné il y a quelques temps maintenant. Je vis dans son immense demeure vide et froide. Des complots jaillissent à tous les coins de rue et les débats au Sénat sont encore plus ennuyeux que ceux du Tribunal.
Puis redressant le dos, tournant ma tête vers Maximus, je lui offris un nouveau sourire.
- Mis à part cela, je me porte comme un charme. La politique a quelque chose de tellement passionnant que je me rends dès que je peux au Sénat. Un simple regard sur les tribunes et on imagine aussi bien les pires attentats que la plus fière des loyautés. C'est un monde qui me plait, oui.
Oh, je ne regrettais en rien d'être entrée en politique, bien au contraire, cela me retirait pas mal de contrainte et ne m'offrait que des avantages. Ayant une carrière "officielle", on ne me cherchait plus pour vouloir un héritier, on m'accordait une attention polie et respectueuse et j'étais hors de danger de tout soupçon en matière de ma nature synthétique. Tout comme durant mon temps de Consul, je restais connue, mais discrète, ne cherchant pas à attirer l'attention, bien que beaucoup me connaissait de nom. Donc oui, dernier époux mort, j'avais, voilà maintenant un siècle, gardé mon nom de premières épousailles, Atilius. Beaucoup ignorait désormais de qui je descendais.
- Plus sérieusement, il faut que je passe chez ce Vautour de Spurius. Je ne me sens pas à l'aise seule à la maison et les androïdes qui y vivent sont... dépassés par les évènements. L'une se plante au milieu de la pièce, l'autre se prend un mur et un troisième confond "seau d'eau" avec "amphore de vin"... Il faut que je les change, les réparer reviendrait probablement plus cher. Il n'y a que le jardinier qui fait un travail absolument fantastique. As-tu quelques instants, j'aimerais connaître ton opinion sur un projet et c'est ton art que je tiens à utiliser ou souhaites-tu t'occuper de cette... chose?
Au dernier mot, mes yeux s'étaient placés sur l'androïde. Comment le décrire? Chose? Il ne bougeait pas, restait là impassible face à notre conversation. Oui, chose.