par Thalie Helvius le 08 Août 2012, 12:51
Les apparences sont importantes dans cette société et en cette ville. Les regards, les jugements vont bon train et sont souvent rapides et sommaires. L’image est un bien précieux que l’on cherche à chérir, protéger. En tant que prêtresse de la déesse Vénus, je n’échappe absolument pas à ce manège. La coutume ou la tradition veut que les humains de cette ville possèdent un androïde ou plusieurs. Il serait catastrophique que l’on me surprenne à faire moi-même de basse besogne. Naturellement, cela ne m’arrive pour ainsi dire jamais. J’aime trop dispenser mes commandements, mes ordres pour me voir, moi-même, endosser le rôle de la servante. Ce rôle, cette fonction, elle n’est que pour Venus en personne. Je suis sa fidèle dévouée, servante, lui obéissante en toute humilité. Je sais que j’ai été choisi à ma naissance, et ce gage merveilleux, je lui en rends témoignage chaque jour. Mon dernier androïde n’a pas tenu la semaine. Je crois que je n’ai pas de chance avec ces choses-là. Peut-être parce que dès le départ, je garde un sentiment dédaigneux à leur encontre. Je n’aime pas ces machines. Pourtant, me voici en route pour le marché aux esclaves, bien décidée à trouver la perle rare, celle qui mettrait en valeur ma maison…
"Te voici oh divine prêtresse. Ta présence m’honore ainsi que ma boutique et mes clients !"
"Oh je ne suis pas d’humeur Spurius, ne commence donc pas."
Un léger rictus apparaît sur ses lèvres. Je crois le connaître parfaitement. C’est un roublard, un commerçant pure souche. Il aime parader, vanter des mérites qu’il ne possède pas, et rouler les clients, et encore plus les clientes dans la farine, pour leur faire croire tout et n’importe quoi. Mais j’ai un caractère assez trempé, et je ne marche pas dans ce genre de combine, du moins, c’est l’impression que j’ai de moi. Et je crois que Spurius apprécie les femmes de caractère. Il m’invite à entrer, s’intéressant immédiatement de la raison de ma venue chez lui. Il faut dire que personne ne vient vraiment ici de gaité de cœur je crois…
"Divine prêtresse, que puis-je faire pour t’être agréable en cette belle journée ?"
"J’ai besoin d’un nouvel androïde. Le dernier que tu m’as vendu ne valait rien ! J’attends d’ailleurs de toi des excuses !"
Mon ton est cinglant et cassant. Déjà que je déteste les androïdes, si en plus je me mets à ramener chez moi des défectueux. Spurius lui semble de plus en plus embarrassé, comme s’il avait toujours su les défauts de l’autre…
"Je ne comprends pas divine prêtresse. Je t’assure qu’il fonctionnait parfaitement ici."
Je veux bien lui laisser le bénéfice du doute. Après tout, avec ces machines là, on ne sait jamais vraiment à l’avance le lot de surprises qu’elles vous réservent. Et ce sont toujours les pires, naturellement, jamais des bonnes. J’hausse mes épaules dénudées, et j’avance d’un pas lent dans la boutique, détaillant de mon regard envoûtant, chaque visage, expression figée sur ces machines qui semblent inertes. Je suis vêtue d’une courte tunique, d’un blanc immaculé, et si le tissu se veut légèrement transparent, il ne cache absolument rien de mes courbes harmonieuses. D’ailleurs, Spurius semble se délecter de cette vue…
"Faisons un marché toi et moi. Je vais encore te prendre un androïde, de qualité, je l’espère. Je ne te demande pas de geste commercial cette fois-ci. Mais si, celui que je choisis en ce jour, casse, alors, je reviendrais mais cette fois-ci, pour t’en prendre deux, que je ne payerai pas, entendons-nous bien."
Oui moi aussi j’ai une mentalité de commerçante mine de rien. Je le vois à la fois intéressé, mais aussi contrarié. Son regard plonge vers le sol, fouillant ça et là comme pour y trouver une réponse, ou la solution miracle. Pour ma part, je m’amuse de ce spectacle particulièrement divertissant. D’ordinaire, c’est lui qui se plaît à me rouler, à me faire crouler sous ses arguments de vente. Je rigole légèrement…
"Allons, c’est une offre respectable que je te fais là Spurius."
Moi aussi j’aimerais bien le rouler au moins une fois. Je m’arrête alors devant un androïde en particulier. Ses yeux sont ouverts, et sont d’un bleu captivant. Il a le physique d’une statue, d’un éphèbe. Une apparence à la fois solide, dure, mais aussi douce. Je ne le trouve pas comme les autres, et je reste curieuse quant à ses fonctions, son origine…
"Dis-moi Spurius, celui-ci, d’où vient-il ?"
"Oh, un ami à moi me l’a confié. C’est un très bon produit divine prêtresse. Mais il va te coûter."
Je souris. Quand Spurius parle argent, c’est qu’il va beaucoup mieux. Je le détaille minutieusement, le contemple sous toutes les coutures, du moins, comme je le peux en cet endroit et cet instant…
"Il m’intéresse. Que c’est t’il faire au juste ? Programmation de base ? J’ai besoin d’un majordome avant tout. Je veux qu’il soit obéissant et pratique."
"Il est tout ça à la fois divine prêtresse, je te l’assure."
"Est-il en état de marche ? Je veux l’entendre, et lui poser des questions."
Un hochement de tête de Spurius, et je reste figée devant la machine, qui me dépasse aisément presque d’une tête. Pourquoi des androïdes aussi grands ? Non ce n’est pas moi qui suis petite ! Je le fixe intensément du regard, admirant le travail fait devant moi. Je n’ai jamais aimé la capacité de ses androïdes à soutenir un regard. Pour moi, ils devraient aussitôt baisser le regard dès qu’un humain soutien le leur un peu trop longtemps. Mais je ne changerais pas le monde toute seule…
"Tu m’entends ? Tu sais parler ? Dis moi ce dont tu es capable, et ce que tu sais faire."
Un cours instant, je l’imagine vêtu d’une tenue de gladiateur, combattant dans le Colisée pour la gloire de Vénus…