Il le laissa parler, l'écoutant mais rien ne l'étonnait dans son insistance sur son innocence. On se sent tous innocents à sa manière. Ce qui l'étonna davantage fut la détermination qu'il avait à vouloir s'en sortir. Un p'tit gars bien vaillant et pour une fois Otho doutait de la culpabilité d'un de ses hommes, ou plutôt futur homme. Il jeta un savon gras à Nersus qui l'attrapa et comprit qu'il devait laver les cheveux de Cassian sans ménagement. Ce savon décapait les peaux les plus crasseuses. Il se frotta le bouc, perplexe et prit à son tour la parole.
- Nous sommes tous innocents à notre échelle. Tu as fait la bêtise de penser les femmes fragiles. Elles sont souvent bien pires que les hommes. Ils se sentent protéger et supérieurs parce qu'ils ont une queue, mais elles ont bien compris comment ça marche. Rien que pour t'être trompé la dessus, avoir été trop naïf, tu es coupable. Tu es un petit homme là où elles essuient leurs pieds hypocrites et t'empoisonnent de mensonges, et de fausses gentillesses pour mieux se délecter de ta chute ensuite. En gros, elles ont rien d'autres à foutre tant le monde d'en haut est passionnant. Tu étais une cible parfaite. La moitié des hommes présents ici ont eu des histoires où les femmes ont mis leurs grains de sable. Ne prends pas ça pour un discours misogyne, mais si les femmes sont interdites ici, hormis de possibles exceptions d'employées un jour peut être... ce n'est pas pour rien. La courtoisie, l'amour ou la gentillesse affective font faire bien des bêtises aux hommes. On en a tous été victimes... Les femmes romaines sont dangereuses. Baise-les mais t'en éprends pas.
Mais c'est qu'il était sérieux en plus. Bien sûr que oui il était sérieux. Otho le grand solitaire qui prit une femme et qui repousse les autres. Comme il aimait à le dire, "la seule femme qui ne m'ait pas jugée, pas fait défaut, c'est la déesse que je prie et qui me fait voir demain. Mon cœur et mon âme vont à elle, chaque jour que fait ce monde." L'âme sage et dure, peu étaient capable de le supporter. Les seuls à l'accepter avec respect étaient ces soit disant rebuts de la société. Et ce gamin allait en faire partie. C'était bien parti. L'épreuve qu'il avait passé était plus lourde que certaines épreuves qu'il avait fait passé à d'autres, surtout la cautérisation sur l'arcade, c'était un truc que plusieurs de ses gars n'auraient pas supporté de cette manière.
- De toute façon , même si je coupais la langue à mes hommes, ils trouveraient d'autres moyens pour me faire chier, dit-il sur un ton amusé, un léger rire , puis un sourire et un regard perdu vers le bas, qui exprimait inconsciemment à quel point il tenait à cette foutue centurie. Mais si j'te la laisse, tache de bien t'en servir.
Il lui posa un seau entre les jambes et se redressa , le visage détendu.
- Nersus quand tu auras fini de l'aider à se récurer, amène-le dans le bureau de la Centurie. J'ai à lui parler en privé.
Sans plus de formalité Otho dépassa les deux hommes et regagna calmement la première pièce de ses appartements qui étaient un lieu officiel. Il attrapa avant ça le reste du repas du soir, fait de pain blanc, pommes de terres cuites et viande de cochon saucé. Il amena l'assiette près du feu de la pièce et attendit , assis de l'autre coté de la table, pensif. Après quelques minutes, il se redressa, ayant oublié les vêtements pour la demi portion. Il s'attarda dans l'armurerie pour trouver ce qui pourrait convenir, mais il verrait pour l'armure le lendemain. Il trouva pagne et tunique pour ce soir, c'était suffisant. Ceinture de cuir. Il devrait finir les soins en plus de cela, après le repas. Il ramena le tout, trouvant les minutes longues.