On s'y trompe souvent, on croit qu'on a appris, qu'on a compris, que ça ne nous touchera plus de la même façon mais si c'est le cas. A chaque fois c'est aussi douloureux. Voilà plusieurs mois que Clio es décédée, j'ai été là à son enterrement, à quoi pouvais-je m'attendre de toute façon, à être heureux ? Quelles étaient les chances que cela se passe bien, que cela se passe vraiment parfaitement bien entre elle et moi ? Tout avait si bien démarré, tout allait si bien et puis il y avait eu son décès. Je préfère ne pas en parler, les raisons, ce qui s'est passé, je n'aime pas en parler, tout ce qu'il y a de vraiment mémorable c'est qu'à présent je suis à nouveau seul et … plus triste que jamais. Cela fait le bonheur de Flora qui m'a pour elle seule, et l'androïde prend grand soin de moi, plus que je ne le fais moi-même. Elle a toujours été un peu effacée, un peu en retrait depuis que j'avais rencontré Clio, mais à présent, elle prenait une place de plus en plus importante à mes côtés. Elle s'occupait de moi comme je ne l'aurais jamais laissée faire en temps normal, je la laisse m'aider comme on pourrait aider un aveugle. Je ne mangeais plus et elle a commencé à préparer des plats délicieux auxquels même mon malheur ne pouvait pas résister. Lorsque j'allais sur la tombe de Clio et que les heures passaient jusqu'au cœur de la nuit, elle venait me chercher pour me ramener à la maison, s'inquiétant de me voir ainsi. Oui j'ai changé, elle me manque, mon cœur fait mal et les nuits seules me redeviennent désagréables. Clio et moi avions toujours été d'une sagesse prodigieuse mais j'aimais la sentir contre moi, respirer son odeur, j'avais pris l'habitude, une habitude délicieuse que n'importe qui aurait pris rapidement. C'était finis pourtant, oui c'était définitivement fini, ça n'arriverait plus jamais et mon lit me semble trop grand, trop vide, elle me manque, elle me manque horriblement. Les efforts louables de Flora ne suffisent pas à me faire oublier ma belle petite blonde dont le parfum de fleurs était si unique. Que pouvais-je faire pour l'oublier quand je rêvais d'elle la nuit, que dans mes moments solitaires j'imaginais entendre ses petits pas discrets venir me rejoindre, qu'il m'arrive quand je m'assoupis de sentir sa chaleur contre moi pour mieux sursauter et réaliser son absence. Clio me manque, elle me manque horriblement.
C'est au bonheur de Flora, mais un bonheur qui ne la rend pas heureuse, je le sens bien, je crois qu'en ce moment je ne suis pas vraiment de bonne fréquentation. Flora est heureuse de partager mon lit, même si ce n'est que pour dormir, je n'ai jamais touché Flora intimement, je ne veux pas lui faire imaginer des choses qui ont peu de choses d'arriver, surtout dans mon état actuel. Alors que les jours passent, ma barbe est devenue plus importante, l'eau a laissé place à du vin et mon sourire a un air maussade et grognon. Je sens que ça touche Flora, que ma solitude l'inquiète, je ne suis pas sorti de chez moi que pour aller sur la tombe de mon aimée. Il faut dire de toute façon que je n'ai jamais été trop entouré et je n'ai aucune envie d'aller voir Camila, qu'elle et Tiberius profitent maintenant que le mort est revenu à la vie. Quand à moi, qui pourrai-je voir ? Il y a bien Nox mais que dire de mon attitude avec elle la dernière ? Elle m'a montrée des envies qui m'auraient tentées mais j'ai fait ce que je fais souvent dans ces circonstances, j'ai fuis le sexe. Je manque d'expérience et une femme comme Nox mérite des attentions délicieuses que je ne me pensais pas capable de lui donner mais surtout, je redoutais qu'elle ne soit imaginée que je sois mon frère. Je ne sais pas si Nox en était aussi amoureuse que je l'ai été de Clio mais soudainement je comprenais sa douleur autrement, d'une façon amoureuse et non fraternelle. Je réalise alors que j'ai été un vrai crétin de dire ce que j'ai dis, d'agir comme je l'ai fait et d'attendre aussi longtemps pour m'excuser. J'ai demandé un peu d'aide à Flora pour me rendre présentable autant que faire se peut. Barbe taillée pour être présentable en barbe de trois jours, un pantalon noir et un haut blanc très simple, ma canne et je me rends chez Nox. Je lui dois des excuses et j'en suis conscient, je regrette d'avoir été assez crétin pour ne pas le faire avant. Devant sa porte, j'ai une hésitation, mais finalement je toque énergiquement, il y a sans doute une cloche quelque part mais avec ma cécité, il m'est difficile de la voir. Lorsque la porte s'ouvre, mon odorat me fait comprendre qu'il s'agit d'elle. Soudainement je ne sais plus trop quoi dire, je la regarde dans les yeux, du moins à la hauteur habituelle de son visage que je lui connais et dont je me souviens parfaitement.
- Nox … Je te demande pardon. La dernière fois … Je ne suis pas venu en espérant que tu acceptes, j'ai été un con, tout ce que je veux c'est que tu saches que je suis désolé. Vraiment désolé.